Réforme des institutions : les pistes de réflexion du comité Balladur

Enquête · 17 sep. 2007 à 22:43

La réforme des institutions

En confiant à Edouard Balladur la présidence d'une commission sur la réforme des institutions, Nicolas Sarkozy a affiché sa volonté de moderniser les institutions de la Ve République. D'un président arbitre qui intervient peu et s'abrite derrière le Premier ministre, Nicolas Sarkozy souhaite passer à un pouvoir exécutif où le président de la République est le véritable chef de l'exécutif, qui s'engage et doit rendre des comptes. Dans cette perspective, il souhaite, par exemple, que le président de la République puisse s'exprimer devant les députés pour expliquer sa politique, ce qui lui est interdit jusqu'à présent au nom de la séparation des pouvoirs entre l'exécutif et le législatif. Si certaines idées relèvent du bon sens, d'autres soulèvent de multiples problèmes institutionnels. Revue de détails des différentes pistes de réflexion du comité Balladur.

1. Un président qui gouverne

Le premier objectif du comité Balladur est de redéfinir le rôle du Président de la République et du Premier ministre. Dans la constitution de la Ve République, le président a un rôle d'arbitre : "il assume, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l'Etat" (art. 5). Et c'est le gouvernement qui "détermine et conduit la politique de la nation" (art. 20). Nicolas Sarkozy souhaiterait que le président soit chargé de déterminer la politique de la nation, le gouvernement ayant pour rôle de la conduire. Concrètement, le président gouvernerait, à charge pour les ministres d'appliquer ses décisions et d'assurer le suivi des projets. Mais premier problème à résoudre : si le président gouverne, que se passe-t-il en cas de cohabitation ? Le dilemme n'a pour l'instant pas été résolu.

2. Un président qui s'exprime devant le parlement

Si le Président de la République devient le premier responsable de la politique du gouvernement, il apparaît logique qu'il puisse s'exprimer devant l'Assemblée Nationale. C'est le souhait de Nicolas Sarkozy. Mais son intervention soulève de multiples questions : les parlementaires pourront-ils voter ou débattre après le discours ? Dans ce cas de figure, à quoi servirait le discours de politique générale du Premier ministre ? Le Président peut-il être responsable devant le parlement ?
Derrière ces interrogations se cache la question de la nature du régime : régime présidentiel avec un pouvoir parlementaire suffisamment fort pour être un vrai contre-pouvoir, ou régime parlementaire avec un chef de l'exécutif responsable devant le parlement. En réalité, le comité Balladur a décidé de ne pas modifier la nature du régime et de proposer des solutions concrètes sans remettre en cause l'architecture de la Ve République.

3. Un Premier ministre qui conduit la politique du président

Depuis l'élection de Nicolas Sarkozy, le rôle du Premier ministre a été considérablement affaibli. Jusqu'à présent, le Premier ministre était le principal chef de la majorité et menait la politique du gouvernement en conformité avec les orientations politiques d'un président plus en retrait. Si le président de la République s'expose et montre en première ligne, le Premier ministre voit de fait son rôle relégué au second plan. La suppression du poste de Premier ministre, un temps envisagé, ne devrait pourtant pas être proposée. En revanche, le rôle du Premier ministre devrait se limiter au suivi et à la mise en oeuvre technique des décisions politiques du Président de la République.

4. D'autres aménagements institutionnels

Plusieurs articles de la Constitution devraient également subir un petit lifting. Ainsi, l'article 16 de la Constitution qui accorde des pouvoirs exceptionnels au chef de l'Etat en cas de crise majeure, pourrait être modifié afin de mieux encadrer l'attribution de ces pleins pouvoirs. De même, le droit de grâce devrait être conservé mais mieux contrôlé par le Conseil Supérieur de la Magistrature. Le droit de grâce collectif serait, en revanche, supprimé.
Enfin, l'utilisation de l'article 49-3 qui permet de faire adopter un projet de loi sans passer par un vote, serait maintenu pour seulement deux types de texte : les projets de loi de finances, et les projets de financement de la Sécurité sociale.

La philosophie générale de la commission est donc bien de moderniser les institutions sans toutefois aller jusqu'au changement de constitution et de régime.

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