Hauts conseils, hauts comités : des structures qui se sont démultipliées

Enquête · 8 sep. 2008 à 23:22

Hauts Conseils

Le président de la République fixe la politique de la Nation, le gouvernement la met en oeuvre. Les députés votent les lois, les sénateurs les vérifient et les amendent. Ces principaux acteurs de la vie politique ont tous été élus. Mais les projets de loi, les propositions de réformes, ne viennent pas tous de ces acteurs. Des hauts conseils, hauts comités ou commissions ont été créés pour venir alimenter la réflexion des politiques. Experts et spécialistes soumettent alors leurs idées et les synthétisent dans des rapports. Tout ceci est légitime et utile pour l'exécutif. Mais quand ces structures se chevauchent et se démultiplient, c'est l'existence et le bien fondé de ces institutions coûteuses pour l'Etat qui peuvent être mises en cause.


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Episode 20 : Quand l'Etat démultiplie les structures administratives...

Argent du pouvoir

Qu'est-ce qu'un haut conseil ?

Un Haut Conseil est une instance qui se donne pour mission de réfléchir à un problème dans un domaine précis. Divers fonctionnaires et spécialistes sont donc choisis pour leurs compétences afin d'établir des rapports. Le Président de la République, des membres du Sénat, de l'Assemblée nationale ou du Gouvernement désignent, en général, ces hauts fonctionnaires.
Le rôle du Haut Conseil est non seulement de donner son avis sur une situation, un problème soumis, mais surtout il doit surtout proposer des solutions ou des pistes de réflexion qui seront ensuite rendues publiques. Il conseille et guide les ministres ou le Chef d'Etat.
Le Haut Conseil vise souvent à répondre aux inquiétudes des Français sur un sujet sensible ou qui fait l'actualité. Il doit proposer de nouvelles pistes, donner un avis qui se voudrait objectif.

Des structures qui se sont démultipliées

En France, les Hauts Conseils se multiplient. Il en existe dans de nombreux domaines : Haut Conseil de l'Education, Haut Conseil Education-Economie-Emploi, Haut Conseil de la Science et de la Technologie, Haut Conseil de la Francophonie, Haut Conseil de l'Intégration, Haut Conseil de la Coopération internationale, Haut Conseil du Loisir social, de l'éducation populaire et des activités en pleine nature, Haut Conseil pour l'Avenir de l'Assurance maladie, et même un Haut Conseil des Célébrations nationales. La liste est encore longue : chaque ministre pouvant avoir recours à ses Hauts Conseils qui le conseillent dans sa manière d'appliquer son programme.
Le problème de ces Hauts Conseils résident dans le fait qu'ils font ce que les cabinets d'étude ou les conseillers sont censés faire. Certains Hauts Conseils s'avèrent utiles, comme ceux de l'Education ou de la Science. D'autres en revanche semblent plus douteux. Il semblerait que ces Hauts Conseils permettraient ainsi au gouvernement de placer des relations ou des fonctionnaires fidèles. Quand cette situation se produit, l'objectivité des rapports rendus par le Haut Conseil peut porter à caution.

Bilan des "commissions" Sarkozy

Depuis l'arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy, les commissions se sont multipliées, le chef de l'Etat souhaitant recevoir des rapports sur différents thèmes. Rien n'empêche le président de la République de créer autant de commissions qu'il le souhaite puisqu'elles sont des outils d'exercice du pouvoir réglementaire du gouvernement. Il suffit d'un arrêté ministériel ou d'un décret du Premier ministre pour mettre en place un Haut Conseil.
En janvier 2008, par exemple, la « Commission Attali » n'a pas convaincu. Son objectif était de faire des propositions afin de relancer la croissance économique de la France. Mais, le rapport n'a pas fait l'unanimité, provoquant la colère d'un certain nombre d'organisations syndicales comme patronales et même des responsables politiques. Les députés UMP ont peu apprécié leur mise à l'écart.
De même, en février, la « Commission Pochard » sur le métier d'enseignant s'est soldé par un bilan en demi-teinte. Le ministre de l'Education s'est d'ailleurs empressé de minimiser la portée des conclusions du rapport. Le sujet est sensible puisqu'il touche au métier d'enseignant mais aussi à sa rémunération, à son statut...
Il semblerait que jusqu'à présent seules les commissions techniques, concernant Alzheimer, le téléchargement illégal, dépénalisation du droit des affaires aient abouti auprès de l'exécutif, les autres peinant à trouver un consensus.


Pour l'heure, aucune étude ne permet de vérifier l'efficacité de ces hauts conseils et l'ampleur des conversions des rapports en réformes concrètes. Quand une commission Sarkozy élabore des propositions, qui sont détricotées par la suite par les députés, la question de l'utilité de structures administratives qui font doublon est posée.

*** Liens

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