Ajustement ou vrai remaniement : les changements du gouvernement Fillon 4

Revue de presse · 18 jan. 2009 à 19:11

Hortefeux, Besson, NKM

Par un simple communiqué, l'Elysée a annoncé les changements de postes au sein du gouvernement Fillon. S'agit-il du fameux remaniement gouvernemental tant attendu et maintes fois annoncé dans la presse ou est-ce un simple ajustement comme le revendique l'Elysée ? La plupart des changements étaient connus, l'Elysée voulant éviter l'effet de surprise. Xavier Bertrand quitte le ministère du travail pour prendre la tête de l'UMP. Il est remplacé par Brice Hortefeux qui récupère également le portefeuille de la ville. Eric Besson devient ministre de l'Immigration et est remplacé à l'Economie numérique par Nathalie Kosciusko-Morizet. Simple ajustement ou vrai remaniement gouvernemental ? Quel est le sens politique de ces modifications ? Décryptage.

Revue de presse

- Le JDD : NKM, un choix par défaut
- Rue89 : Remaniement rampant en vue des élections européennes
- Le Monde : Un ajustement moins technique qu'il n'en a l'air

Remaniement continu : 7 changements en deux mois

Débuté en novembre, le remaniement continu s'est achevé jeudi 15 janvier 2009. Tout a commencé le 5 décembre 2008, au lendemain de l'annonce du plan de relance, avec la nomination de Patrick Devedjian en charge de l'application de ce plan. Une semaine plus tard, Bruno Le Maire, un proche de Dominique de Villepin, remplaçait Jean-Pierre Jouyet, nommé à l'Autorité des Marchés Financiers (AMF), au poste de secrétaire d'Etat aux Affaires européennes. Le mercredi 17 décembre, Nicolas Sarkozy poursuit son remaniement continu en nommant Yazid Sabeg au poste de Commissaire à la diversité et à l'égalité des chances. Un mois plus tard, le président de la République a donc procédé aux dernières nominations : Hortefeux au ministère du travail, Besson à l'Immigration, Nathalie Kosciusko-Morizet à l'économie numérique... sans oublier Martin Hirsch, nommé haut commissaire à la jeunesse deux jours plus tôt. En procédant à un remaniement continu, Nicolas Sarkozy cherche avant tout à minimiser l'effet de ces changements dans l'opinion pour garder sous le coude un "vrai remaniement gouvernemental".

Brice Hortefeux, le nouvel homme fort du gouvernement... et de l'UMP

Pour remplacer Xavier Bertrand, parti à l'UMP, Nicolas Sarkozy a choisi de promouvoir un "ami de 30 ans", Brice Hortefeux. Ce dernier devient ministre du Travail, des Relations sociales, de la Famille, de la Solidarité et récupère aussi la Ville. Il prend donc la tête d'un ministère élargi avec sous son autorité trois secrétaires d'Etat : Solidarité, Famille et Ville. Dans le même temps, Brice Hortefeux devrait également devenir vice-président de l'UMP en charge des investitures. Un poste clé pour un fidèle du président. C'est donc le nouvel homme fort du gouvernement, à charge pour Brice Hortefeux d'effacer son image écornée de ministre de l'Immigration.

Eric Besson, un ministre d'ouverture pour l'immigration

Pour remplacer Brice Hortefeux, le président de la République a fait un nouveau pied-de-nez au Parti Socialiste en nommant Eric Besson, l'ancien secrétaire national du PS. Celui qui avait claqué la porte du PS en pleine campagne présidentielle suite à un différent avec Ségolène Royal s'engage donc un peu plus au côté de Nicolas Sarkozy. Simple secrétaire d'Etat à la prospective (poste plutôt honorifique), il a ensuite pris en charge l'Economie numérique. Un an et demi après son changement de camp, il devient donc ministre, en charge d'une politique de l'immigration marquée très à droite. Un ministre d'ouverture pour une politique de fermeture, c'est la dernière trouvaille de Nicolas Sarkozy pour brouiller un peu plus les pistes et désamorcer les risques de dérapage d'un ministère si décrié. En outre, Eric Besson devrait également intégrer la direction de l'UMP et achever définitivement sa conversation à droite.

Nathalie Kosciusko-Morizet, la "surprise de la nuit"

Pour remplacer Eric Besson au secrétariat à l'Economie numérique, Nicolas Sarkozy et François Fillon avaient d'abord envisagé de nommer le bras droit de Philippe de Villiers. Dans la perspective des élections européennes, l'objectif était de procéder à une ouverture... à droite de la droite pour tenter de contenir les souverainistes. Mais, à la dernière minute, le pouvoir exécutif a renoncé à cette nomination en raison du refus de Philippe de Villiers comme l'explique François Fillon dans une vidéo mise en ligne sur Lepost.fr :



"Dans la nuit", comme le souligne François Fillon, il a donc été décidé de nommer Nathalie Kosciusko-Morizet au poste de secrétaire d'Etat à la prospective et à l'économie numérique. Spécialiste des questions d'environnement, son départ du ministère du développement durable est donc une véritable surprise. Pour l'instant, il n'est pas d'actualité de nommer un remplaçant pour seconder le ministre d'Etat, Jean-Louis Borloo (dont les relations avec NKM était exécrable). Difficile de dire si ce départ est une promotion ou un placard, étant donné qu'Eric Besson avait déjà largement avancé sur le chantier du numérique.

Christine Boutin, la seule sanctionnée

Puisque l'Elysée ne voulait pas donner le sentiment de procéder à un véritable remaniement ministériel, Nicolas Sarkozy a renoncé à sanctionner les ministres qu'ils ne voulaient plus à leur poste. Michèle Alliot-Marie, Christine Lagarde, Rachida Dati n'ont donc pas changé d'affectation. Seule Christine Boutin, très critiquée à l'Elysée, a vu son portefeuille ministériel raboté de moitié. Ministre en charge du logement et de la ville avec Fadela Amara sous son autorité, Christine Boutin a perdu le dossier de la ville, confié à Brice Hortefeux. L'objectif du président était de séparer les couples ministre/secrétaire d'Etat qui ne fonctionnaient pas, d'où les séparations Borloo/NKM et Boutin/Amara.


Un prochain "ajustement" devrait avoir lieu au mois de mai pour remplacer les ministres-candidats aux élections européennes. Michel Barnier, ministre de l'agriculture ou encore Valérie Létard, secrétaire d'Etat à la Solidarité, devraient céder leur place. En deux mois, Nicolas Sarkozy a donc bien procédé à un remaniement gouvernemental d'un nouveau genre, le remaniement continu.

*** Liens

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- Claude Guéant, chef du gouvernement bis de Nicolas Sarkozy
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