Qu'est devenu le contre-gouvernement de Jean-Marc Ayrault ?

Revue de presse · 30 jan. 2008 à 18:58

Le contre gouvernement du PS

C'était censé être l'innovation de l'opposition parlementaire pour la XIIIe législature de la Ve République : le Parti Socialiste, sous la houlette de Jean-Marc Ayrault, avait nommé officiellement un "contre-gouvernement" fantôme au mois de juin dernier. Une équipe de quinze vice-présidents du groupe parlementaire était censée coordonner le travail de l'opposition. Mais 8 mois après la composition de ce "Shadow cabinet" à l'anglaise, quel est le bilan du contre-gouvernement ?

Revue de presse du mercredi 30 janvier 2008

- Le Monde : "Le Parti socialiste a besoin d'un leadership fort"
- Libération : Les députés socialistes notent les ministres

- Politique.net : Les socialistes s'organisent en cabinet fantôme à l'Assemblée (28.06.2007)

Shadow cabinet : une idée qui vient d'Angleterre

En créant ce contre-gouvernement, Jean-Marc Ayrault voulait placer le groupe parlementaire en première ligne du travail de l'opposition. Chaque vice-président était chargé de coordonner une commission parlementaire pour étudier les textes de lois mais aussi fournir des propositions pour l'opposition. Par exemple, Arnaud Montebourg était censé travailler sur la prospective économique, Manuel Valls devait suivre les questions de sécurité et Elisabeth Guigou les Affaires étrangères.
Ce cabinet fantôme reprenait le principe du modèle anglais. Au Royaume Uni, la tradition veut que l'opposition compose un "Shadow cabinet" qui correspondrait au gouvernement si elle était au pouvoir.

Le contre-gouvernement a noté les ministres

Les députés socialistes ont noté les membres du gouvernement en faisant des commentaires sur le travail des ministres. En procédant ainsi, ils ont en quelques sortes légitimé le principe de notation élaboré par François Fillon et un cabinet privé alors que tous les commentateurs reconnaissaient qu'il s'agissait d'un simple gadget. Les critères de notation ont été très critiqués et jugés presque fantaisistes, la ministre de la culture étant pas exemple notée sur le niveau de fréquentation des musées et des cinémas.
Malgré ces critiques, les députés du contre-gouvernement ont donc évalué les ministres : Jean-Louis Borloo a été qualifié de "faux dilettante", Bernard Kouchner de "transparent", Xavier Darcos de "cynique". Ces qualificatifs n'ont été accompagnés d'aucune argumentation, d'aucune contre-proposition. L'exercice était donc inutile et purement médiatique.

Un contre-gouvernement vraiment "fantôme"

A l'origine, les porte-paroles du contre-gouvernement, André Vallini et Aurélie Filippetti, avaient pourtant présenté l'initiative comme révolutionnaire : les vice-présidents devaient faire une analyse critique de chaque texte de loi, donner leur point de vue et faire des contre-propositions. L'opposition ne devait plus simplement s'opposer mais être pragmatique, expression à la mode, en faisant des contre-propositions. L'objectif était d'être à la fois combattif, constructif et travailler pour le futur projet du Parti Socialiste.
En réalité, le contre-gouvernement est mort-né. Dès sa création, François Hollande en a contesté sa légitimité, l'opposition devant être incarnée selon lui par le Premier secrétaire du parti. Les secrétaires nationaux du PS ont d'ailleurs contesté les attributions des membres de ce contre-gouvernement. Enfin, pour l'opinion, la personne mieux à même à incarner l'opposition reste l'ancienne candidate à l'élection présidentielle, Ségolène Royal.

La gauche n'ayant pas de leader, toutes les initiatives de l'opposition sont vouées à l'échec car systématiquement brouillées par un trop grand nombre d'acteurs qui ne vont pas tous dans le même sens. François Hollande s'est maintenu à la tête du PS une année de plus, Ségolène Royal fait cavalier seul pour s'emparer de la direction du PS, et Jean-Marc Ayrault a créé un contre-gouvernement inutile, simplement pour justifier sa réélection à la tête du groupe parlementaire. Le cabinet fantôme porte donc bien son nom et la rénovation de l'opposition attendra le congrès du PS de novembre 2008.

*** Liens

- Création du contre-gouvernement en juin 2007
- Comment la gauche peut-elle s'opposer au gouvernement ?
- Les hésitations stratégiques de Ségolène Royal
- Bataille d'éléphants, synthèses obscures : la crise du PS est profonde
- Bulletin de notes de ministres : une évaluation biaisée
- Evaluation des ministres : combien ont coûté les services du cabinet d'audit privé ?

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