Laurent Fabius, portrait du ministre des Affaires étrangères

Portraits politiques · 27 jan. 2013 à 14:24 · Commentaires 0

Laurent Fabius

Numéro 2 du gouvernement, Laurent Fabius est en première ligne dans la guerre au Mali. Une guerre décidée par François Hollande et que Fabius doit désormais cogérer avec le ministre de la Défense. Après avoir été Premier ministre, président de l'Assemblée nationale et ministre de l'Economie, Fabius rêvait d'être à la place de François Hollande. Une primaire socialiste plus tard (en 2007) et un ticket raté avec Martine Aubry (en 2012) ont définitivement douché ses ambitions. Pragmatique, il s'est alors rallié à son ancien adversaire. Mieux vaut être numéro 2 que retraité de la vie politique. Portrait.

Origines et formation

Laurent Fabius est né le 20 août 1946 à Paris, au sein d'une famille d'antiquaires parisiens. Son père, André Fabius, est issu d'une famille de religion juive, d'origine ashkénaze, et sa mère, Louise Mortimer, est américaine. Il grandit dans le XVIe arrondissement de Paris. Benjamin de la famille, il a une sœur, Catherine Leterrier (née en 1942) et un frère, François Fabius (1944-2006).
Après avoir fait khâgne au lycée Louis le Grand, Laurent Fabius accède à l'Ecole Normale Supérieure. Il obtient une agrégation de lettres classiques, intègre l'Institut d'études politiques de Paris, et sort dans les trois premiers de l'Ecole Nationale d'Administration, promotion François Rabelais (1971-1973).
En 1973, il devient auditeur au Conseil d'Etat. Il est nommé maître des requêtes en 1981.

Une ascension politique très rapide

Laurent Fabius entre au Parti Socialiste en 1974. C'est en Seine-Maritime qu'il fait ses premiers pas en politique. Premier-adjoint au maire de Grand-Quevilly, il devient député en 1978. L'année suivante, il rencontre François Mitterrand et devient son directeur de cabinet sur les conseils de Jacques Attali. Quand Mitterrand est élu président de la République, Fabius obtient le poste de ministre du Budget. Il impose alors l'Impôt sur les grandes fortunes, ancêtre de l'ISF. En 1983, Pierre Mauroy le nomme Ministre de l'Industrie et de la Recherche, puis ministre de la Modernisation industrielle.

Premier ministre à 37 ans

Suite à l'impopularité de plus en plus grande de la majorité, François Mitterrand décide de remplacer le Premier ministre Pierre Mauroy par Laurent Fabius en 1984, à peine âgé de 37 ans. Mais Fabius arrive à un moment de crise où il doit poursuivre la politique de la rigueur amorcée par Pierre Mauroy. Résultat : le Parti communiste refuse d'entrer dans ce gouvernement. Autre difficulté rencontrée à l'époque : les troubles en Nouvelle-Calédonie sur fond de revendications d'indépendance.
C'est donc dans ce contexte très particulier que Laurent Fabius fait son entrée à Matignon où il devra, en plus, faire face au scandale du Rainbow Warrior. Le 10 juillet 1985, le bateau de Greenpeace est dynamité par la DGSE, faisant un mort. Le Premier ministre est mis en cause, mais il se révèle que c'est le ministre de la Défense, Charles Hernu, qui est directement impliqué dans cette affaire. Il démissionne dès que la responsabilité des services secrets français a été prouvée.
En raison de la dégradation du climat économique, la droite remporte les législatives de 1986, et François Mitterrand est contraint de nommer Jacques Chirac premier ministre en remplacement de Laurent Fabius.
Suite à son passage à Matignon, Fabius sera également confronté, quelques années plus tard, au scandale du sang contaminé. En 1991, il est mis en cause en tant qu'ancien Premier Ministre mais la Cour de Justice de la République le relaxe en 1999 parce qu'au moment des faits, les origines du SIDA n'étaient pas bien déterminées et les moyens de prévention encore incertains.

1988-2000 : Réussite à l'Assemblée nationale, échec au PS

Suite à la réélection de François Mitterrand, il devient président de l'Assemblée Nationale en 1988. En 1989, il est élu au Parlement européen mais y renonce pour rester à la présidence de l'Assemblée nationale et pour mener une autre bataille, interne celle-là : entre 1988 et 1990, il tente de prendre le contrôle du Parti Socialiste contre son rival, Lionel Jospin. A chaque fois, c'est Pierre Mauroy, avec le soutien de Lionel Jospin, qui est reconduit. Ce n'est qu'en janvier 1992 que Laurent Fabius parvient enfin à être élu premier secrétaire du PS. Mais trop tard : suite à la défaite aux législatives de 1993, il cède sa place à Michel Rocard.
Il redevient alors député puis maire de Grand-Quevilly. En raison du scandale du sang contaminé, Fabius est hors-jeu pour la présidentielle de 1995, laissant le champ libre à son rival de toujours, Lionel Jospin. Lorsque ce dernier devient Premier ministre en 1997, Laurent Fabius redevient président de l'Assemblée nationale.

Ministre de l'Economie et des Finances entre 2000 et 2002

Le 27 mars 2000, Fabius est nommé ministre dans le gouvernement Jospin au poste de ministre de l'Économie et des Finances. Il se charge de la mise en œuvre des 35 heures. Dans une période économique plutôt favorable, il mène également une politique de réduction des impôts, politique mal acceptée par ses adversaires de gauche qui lui reprochent de mener une politique trop libérale. La vignette automobile est par exemple supprimée.
Au poste de ministre de l'Economie, il supervise aussi le passage à l'euro en 2002.

Du non au référendum de 2005 à la primaire socialiste de 2006

Quand Jacques Chirac est réélu en mai 2002 président de la République, Fabius quitte le gouvernement et retrouve son siège de député de Seine-Maritime. Dès lors, il prépare la campagne présidentielle de 2007 avec la ferme intention de se faire élire.
En 2004, il s'oppose, contre l'avis général du Parti Socialiste, au traité établissant une Constitution pour l'Europe. Lors de la campagne du référendum, celui qui est encore numéro 2 du PS fait campagne pour le « NON », qui l'emporte le 29 mai 2005. Très critiqué par de nombreux dirigeants socialistes, on qui lui reproche de ne pas avoir respecté le vote des militants socialistes, favorables au traité. Exclu des instances du secrétariat national du PS, Fabius et les partisans du Non restent tout de même au PS.
En novembre 2005, il dépose une motion contre la majorité sortante lors du congrès du Mans et remporte 21,21 % des suffrages. Ce score honorable lui permet de se retrouver de nouveau dans la majorité du PS. Mais il refuse de réintégrer la direction du parti pour garder une certaine indépendance.
Le 1er octobre 2006, Laurent Fabius se présente officiellement à la primaire socialiste en vue de l'élection présidentielle, contre Ségolène Royal et Dominique Strauss-Kahn. Mais il n'arrive qu'en troisième position. Dès le lendemain des résultats de la primaire du PS, il annonce son soutien à Ségolène Royal.
En juin 2007, après l'échec de la candidate PS à la présidentielle, il se représente aux élections législatives et remporte 67% des suffrages. L'année suivante, il est élu président de la communauté d'agglomération de Rouen qui devient communauté d'agglomération Rouen-Elbeuf-Austreberthe (CREA) en janvier 2010.

Présidentielle 2012 : l'échec du pacte avec Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry

Pour la présidentielle 2012, Laurent Fabius passe un pacte avec Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry : seul le meilleur des trois dans les sondages se présentera à la primaire socialiste, ouverte à tous les électeurs. Une manière d'éviter la division. Résultat ? En raison des mauvais sondages le concernant, et suite au scandale de l'affaire du Sofitel à New York mettant en cause DSK accusé d'avoir agressé une femme de chambre, Fabius annonce officiellement son soutien à Martine Aubry. On connaît la suite : c'est finalement François Hollande qui est désigné candidat du Parti Socialiste.
Cherchant à rassembler tout le PS derrière sa candidature, François Hollande propose alors à son ancien rival de le représenter, pendant sa campagne, dans ses déplacements à l'étranger, notamment au Proche-Orient et en Extrême-Orient. Une alliance plutôt étonnante quand on connaît l'inimitié entre les deux hommes, Fabius n'ayant eu de cesse de donner des sobriquets à François Hollande : « Monsieur Petites Blagues », « petite fraise des bois », déclarant même publiquement : « Hollande président de la République ? On rêve ! ».

Ministre des Affaires étrangères

Le 16 mai 2012, Fabius est nommé ministre des Affaires étrangères. Numéro 2 dans le gouvernement Ayrault, c'est le ministre le plus expérimenté. A ce poste, il est confronté à plusieurs dossiers urgents. Dans un premier temps, avec le ministère de la Défense, il doit préparer le retrait définitif des troupes françaises en Afghanistan. D'autre part, il est en charge du dossier syrien pour tenter d'obliger Bachar El Assad de quitter le pouvoir. Mais la situation reste bloquée, la Russie s'opposant à toute intervention de l'ONU en Syrie.
Autre dossier : la situation au Mali. Coupé en deux depuis près d'un an, le pays est menacé par l'invasion des djihadistes au Nord. Pendant des mois, Laurent Fabius négocie avec les chefs d'Etat africain et l'ONU pour venir en aide militairement au Mali. Mais début janvier 2013, en raison d'une nouvelle offensive des islamistes du Nord, prêts à marcher sur la capitale Bamako, la France décide de lancer, seule, une intervention militaire pour stopper les djihadistes. A charge désormais à Laurent Fabius d'obliger les autres pays africains ainsi que les Occidentaux à prendre le relai pour éviter les accusations d'un retour à la Françafrique.


*** Sources
- « Laurent Fabius », in Dictionnaire historique de la vie politique française, PUF, 2003
- J. Waintraub, « Le grand retour de Fabius au gouvernement », Le Figaro,16.05.2012
- Marc Semo, « Laurent Fabius un stratège au Quai », Libération, 16.05.2012
- B. Hugues, « Fabius au Quai d'Orsay, le retour de l'ancien rival », France TV info, 16.05.2012



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