Michel Rocard déplore la faiblesse du PS et flingue Ségolène Royal

Revue de presse · 15 jan. 2008 à 20:23

Michel Rocard et Ségolène Royal

Michel Rocard vient de frapper fort. Dans une tribune publiée dans le journal Libération, l'ancien Premier ministre revient sur les raisons de la crise du Parti Socialiste. Sans idées, sans leader, le Parti est anesthésié depuis des années. Pire, selon lui, la prise de contrôle du parti par Ségolène Royal ruinerait les chances de victoire du PS aux prochaines élections.

Revue de presse du mardi 15 janvier 2008

- Libération : Tribune de Michel Rocard intitulé "Halte au meurtre"
- Le Figaro : Ségolène Royal, une certitude de défaite
- Libération : Peillon demande à Rocard d'arrêter le jeu de massacre envers Royal

Un parti vieillissant qui n'a pas adapté ses idées au monde moderne

Selon Michel Rocard, le véritable problème du parti socialiste réside dans son absence de « discours cohérent ». Les sujets de discorde sont nombreux et les différents membres du parti n'expriment pas un même point de vue sur des thèmes importants comme le capitalisme ou l'Europe. Il faudrait donc que le PS se positionne par rapport à ces sujets en prenant en compte l'évolution de la France. En effet, puisque la société a évolué, que le pays est en crise, la gauche ne doit plus penser comme en temps de pleine croissance. Elle doit faire des choix audacieux et réfléchir à des projets de réforme par rapport à l'Europe au lieu de rester dans son coin. Michel Rocard estime que le socialisme tel qu'il est pratiqué depuis plusieurs années est sclérosé, replié sur lui-même et ses vieux principes qui n'ont plus de rapport avec la réalité politique et économique actuelle.

Aucun leader charismatique pour imposer des idées

Le Parti socialiste a un autre problème de taille : il n'a pas de leader. Les candidats pour prendre la place de secrétaire sont nombreux, pourtant pas un seul ne semble remporter les suffrages et rallier à lui les différents membres. Cela est dû précisément à cette diversité des discours. Sans un accord commun, personne ne pourra imposer les idées du Parti. Ainsi, le PS doit déterminer certains positionnements sur l'économie de marché et l'Europe, les deux points forts, selon Michel Rocard, qui permettront d'avoir une ligne de conduite plus claire. En effet, actuellement, certains sont hostiles à l'Europe comme Laurent Fabius, d'autres au contraire, ont des idées plus libérales, comme Dominique Strauss-Kahn. Le Parti socialiste doit trancher et donner des réponses claires à ses électeurs au lieu de laisser entendre les désaccords sur des questions fondamentales.

François Hollande a affaibli le PS en refusant de trancher sur les grandes questions

D'après Michel Rocard, François Hollande est en grande partie responsable de la situation, lui qui n'a pas osé imposer son point de vue préférant donner une synthèse de toutes les positions du parti. Lors du dernier congrès au Mans, la majorité des socialistes voulaient qu'il donne des positions claires et qu'il cesse de faire des projets utopiques. Mais François Hollande a préféré ménager la chèvre et le chou provoquant un certain mécontentement. Or, pour faire de véritables réformes et moderniser le parti, Michel Rocard attend des prises de risques, donnant lieu à des lignes directrices claires. Sans cela, il estime que le PS est voué à disparaître.

Ségolène Royal : entre incompétence et amateurisme stratégique

Même si selon Michel Rocard la crise du PS est due avant tout à un manque de positionnement idéologique et intellectuel, le leader pose également problème. Pour lui, les socialistes ont fait un terrible choix en désignant Ségolène Royal comme candidate : il la trouve incompétente et incapable de tenir un discours cohérent. De plus, choisir dès à présent le candidat à l'élection de 2012 est une erreur parce que celui-ci risque de s'essouffler avant la fin de la course. C'est ce qui est arrivé à tous les candidats jusqu'à présent. Les médias s'attacheraient, selon lui, à tous les faits et gestes du futur candidat, provoquant ainsi son échec.
Michel Rocard estime que si l'on reproduisait ce modèle qui a fait ses preuves, Ségolène Royal risquerait alors de devenir la candidate à la prochaine présidentielle puisqu'il apparaît comme évident qu'elle sera désignée comme la secrétaire du PS. Or, ce serait pour lui un désastre : on reproduirait le même épisode tragique qu'en 2007. Le pire, selon lui, c'est qu'il n'y a aucun autre postulant crédible pour le moment : Bertrand Delanoë brigue de nouveau la mairie de Paris et n'a donc pas le temps de s'occuper du parti et Dominique Strauss-Kahn est aux Etats-Unis jusqu'en 2012. Il ne pourra donc pas se présenter à la prochaine élection présidentielle et se tiendra à l'écart du parti pendant plusieurs années.

Un Premier secrétaire de transition en 2008 et un candidat en 2011

Selon Michel Rocard, faute de leader, le PS devra choisir un Premier secrétaire de transition qui sera prêt à rénover de fond en comble les idées du parti. L'ancien Premier ministre souhaite que le parti se dirige vers des idées réformistes issues de la social-démocratie, plus proche des réalités politiques et économiques. Ce sera au secrétaire de mener ces projets et de garder une ligne de conduite claire sans faiblir. Il devra prendre des positions courageuses et définitives sur la mondialisation et l'Europe. L'ancien Premier ministre espère aussi que le secrétaire ne s'attachera pas à attaquer le président de la République, pour le moment plébiscité par les médias et les Français, mais afficher un positionnement clair, d'opposition avec le discours de la majorité. Il devra mettre en avant un projet cohérent et non une personne médiatique. Les débats n'auront pas lieu sur la forme mais sur le fond. En fait, il faudra s'opposer à Nicolas Sarkozy en s'intéressant aux idées et non plus à ses coups médiatiques.
Le candidat à l'élection présidentielle de 2012 ne devra être choisi qu'à l'occasion du 75ème congrès du PS, à l'automne 2011. D'après Michel Rocard, cette solution permettra au candidat désigné de ne pas griller toutes ses cartes auprès des médias avant le début de la campagne présidentielle et d'avoir de plus grandes chances de remporter l'élection.

Cette sortie de Michel Rocard va encore en agacer plus d'un. Ségolène Royal est devenue la cible privilégiée des anciens Premiers ministres. En septembre dernier, Lionel Jospin avait déjà écrit un livre assassin sur l'ex-candidate socialiste. Outre les conflits de personne, les procès en incompétence jettent un peu plus le doute sur les capacités de Ségolène Royal à s'imposer comme une potentielle femme d'Etat.

*** Liens

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