Les femmes et la présidentielle : une candidate au deuxième tour en 2007

Livres politiques · 18 jan. 2009 à 21:54

Royal, candidate

Si depuis les années 1970 les femmes ont commencé à apparaître dans le paysage politique unanimement masculin jusqu'alors, c'est Ségolène Royal qui est parvenue véritablement à entrer dans l'Histoire comme étant la première femme présidentiable en 2006. Mariette Sineau dans son document, La Force du nombre - Femmes et démocratie présidentielle, revient sur le parcours de cette femme à la fois populaire et victime de misogynie qu'est Ségolène Royal.


Série 5/5 : Une femme au deuxième tour de la présidentielle

Les femmes et la présidentielle

Comment Ségolène Royal est devenue candidate à la présidentielle

Pour la première fois dans l'histoire de la présidentielle française, le candidat à l'investiture, n'est pas secrétaire du parti socialiste et surtout est une femme. Ségolène Royal permet donc un véritable tournant dans les pratiques de la politique, à une période où les citoyens avouent se désintéresser du sujet. Elle plaît, selon Mariette Sineau, parce que précisément, elle a un parcours qui semble atypique par opposition à ses deux adversaires des primaires : Dominique Strauss-Kahn et Laurent Fabius. Pourtant, Ségolène Royal est un pur produit énarque : elle a fait partie du cabinet élyséen de François Mitterrand, a occupé différents postes au gouvernement et surtout est élue de la région Poitou-Charentes. Elle n'est donc pas une débutante. Mais, comme elle n'a jamais occupé un poste majeur au Parti socialiste ni dans un gouvernement, elle n'est donc pas considérée, d'emblée, comme une candidate capable de remporter l'élection présidentielle.
Pourtant, c'est son succès populaire qui va la propulser au-devant de la scène médiatique et faire d'elle la principale adversaire de Nicolas Sarkozy. De nombreux sondages, publiés dès l'automne 2005, la place favorite parmi les candidats potentiels au PS. Les sympathisants puis les partisans et enfin les cadres du Parti envisageront son élection à la primaire comme la seule possibilité de contrer l'arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy.
Les sympathisants socialistes semblent, selon Mariette Sineau, avoir également été sensibles au profil de Ségolène Royal qui apportait un parfum de nouveauté à un parti en perte de vitesse depuis l'échec de Lionel Jospin à l'élection présidentielle de 2002. Prenant des distances avec le parti et proposant une nouvelle manière de faire de la politique à travers la démocratie participative, elle a suscité auprès de nombreuses personnes, réfractaires à la politique, un certain engouement.
La candidate socialiste possède également un autre atout : l'image d'une femme moderne, mère de quatre enfants et pourtant impliquée dans sa vie professionnelle. Ces critères ont convaincu les femmes, en particulier les plus jeunes et les cadres. Mais les féministes semblent divisées : certaines reprochent à Ségolène Royal de ne pas expliciter son programme en faveur des femmes et de privilégier la cellule familiale au détriment de l'individu.
Quant aux ouvrières et aux femmes âgées, elles ont largement préféré apporter leurs suffrages à Nicolas Sarkozy qui incarne mieux, selon elles, les valeurs traditionnelles.

Ségolène Royal, victime de misogynie

Force est de constater que si Ségolène Royal a pu bénéficier, au départ, d'un capital sympathie auprès des citoyens, très rapidement, une fois investie par son parti, elle fut la cible de nombreuses attaques, visant son statut de femme. Selon Mariette Sineau, en effet, « parmi les « vérités » qu'a révélées la présence de la candidate socialiste, le machisme ordinaire des hommes politiques vient au premier rang ». Les petites phrases assassines et mesquines reviennent sous la plume de l'auteur : « qui va garder les enfants ? », « la présidence de la République n'est pas un concours de beauté », autant de phrases remettant en cause l'élection de Ségolène Royal par son parti et surtout ses compétences politiques, la réduisant à son statut de femme ou de mère de famille.
Mariette Sineau remarque que son adversaire, Nicolas Sarkozy, après avoir fait remarquer qu' « elle n'est pas outillée », prévoit que ce genre de réflexion pourrait lui faire défaut et le faire passer pour un homme macho et par conséquent violent. Il s'interdit alors toute allusion et préfère reléguer ce rôle aux femmes défendant sa campagne : Rachida Dati, Nadine Morano et Michèle Alliot-Marie, qui elles non plus ne manqueront pas de formules proprement sexistes.
Selon Mariette Sineau, les journalistes ont également joué un rôle dans le travail de sape de Ségolène Royal en la qualifiant de « Madone des sondages », de « vierge blanche » ou de « Bécassine de la politique ». Ils ne font donc pas appel au registre politique pour se référer à la candidate socialiste préférant demeurer dans le domaine de la superficialité ou du physique, « pour bien lui faire savoir qu'elle n'est pas à sa place sur cette scène ». Toutes ces moqueries vis-à-vis de son physique, de son statut auraient donc nui à la candidate. On aurait ainsi exigé davantage de compétences de sa part en regard de celles de Nicolas Sarkozy.


On regrettera cependant que Mariette Sineau pointe du doigt les dérives sexistes des journalistes comme des politiques à l'encontre de Ségolène Royal sans rappeler certaines erreurs de stratégies voire gaffes de la part de la candidate qui s'est ainsi retrouvée dans certaines situations ridicules.



Mariette Sineau, La force du nombre - Femmes et démocratie présidentielle, éditions de l'Aube, 2008, 203 p.

*** Liens

Femmes et démocratie présidentielle
- Election présidentielle : l'entrée des femmes sur la scène politique
- Campagnes présidentielles et féminisme : avancées et reculs
- Le vote des femmes aux élections présidentielles : de la droite vers la gauche
- Le rôle des femmes dans la vie politique : ministres et candidates
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