La revanche de l'opinion : l'importance des sondages dans la vie politique

Livres politiques · 5 mai 2008 à 23:40

Roland Cayrol

Après une année passée à l'Elysée, personne n'aurait pu prédire l'effondrement de Nicolas Sarkozy dans les enquêtes d'opinion. As des sondages depuis 2002, le chef de l'Etat avait toujours su capter les attentes de l'opinion et se servir du système médiatique pour maintenir une bonne cote de popularité quand il était ministre de l'Intérieur. Mais après quelques mois passés à l'Elysée, la chute vertigineuse s'est amorcée sans que quiconque ne soit en mesure de l'enrayer. Le spécialiste de la communication politique a multiplié les erreurs, terni son image et peine désormais à remonter la pente dans les sondages. Ce dévissage spectaculaire montre à quel point l'opinion est versatile. Dans un ouvrage intitulé "La revanche de l'opinion", Laurent Cayrol, directeur de l'institut de sondages CSA et chercheur au centre de recherches politiques de Sciences-Po, analyse l'importance des enquêtes d'opinion dans la vie politique. Il décrypte notamment la manière dont les médias façonnent cette opinion.

Cette semaine, à l'occasion du premier anniversaire de l'élection de Nicolas Sarkozy, Politique.net publie une série en 5 volets sur la démocratie d'opinion, à un moment où le président de la République peine à remonter dans les sondages.

Série 1/5

Revanche de l'opinion




En France, on a recours à deux types de sondages : l'aléatoire (consistant à tirer au sort dans l'annuaire des numéros de téléphone) ou par quotas (reproduction dans l'échantillon des caractéristiques de la population en fonction de l'âge, du sexe, de la catégorie socioprofessionnelle...). Le problème qui se pose actuellement est de contacter les gens. Nombreux sont ceux qui n'ont pas de téléphone fixe. De plus en plus, les sondeurs contactent ceux qui ne possèdent que des cellulaires.

Contrairement aux idées reçues, les sondages permettent de contrer les rumeurs en se basant sur des calculs scientifiques et non d'encourager les bruits de couloir. Ainsi, en 2002, les instituts de sondage avaient prévu que Lionel Jospin et Jean-Marie Le Pen étaient au coude à coude dans les intentions de vote mais personne n'a voulu envisager la possibilité d'un second tour entre Le Pen et Chirac.

Selon Roland Cayrol, les sondages sont très importants pour responsabiliser les citoyens : ils permettent de faire basculer une tendance ou de l'intensifier. Si un électeur a envie de voter pour un candidat issu d'un petit parti mais qu'il sent que sa famille politique est en danger, il aura intérêt à faire un « vote utile ».

Pourtant, les sondages ne sont pas une science exacte puisque les gens interrogés ne font pas obligatoirement ce qu'ils ont déclaré aux sondeurs. Ainsi, le taux d'abstention est toujours plus important dans la réalité : les gens n'assument pas le fait de s'abstenir. Ensuite, les sondés avouent peu voter Front national, préférant dire qu'ils votent Vert. Par conséquent, pour obtenir des résultats plus adéquats, les sondeurs sont obligés d'adapter les réponses, de se baser sur les résultats des précédentes élections.

Les sondages permettent donc aux Français de connaître les tendances et de faire un choix en fonction de celles-ci. Mais les politiques commandent également de nombreux sondages qui ne seront pas publiés. Ils leur permettent de savoir ce que pensent les électeurs, quels sont leurs attentes, leurs souhaits. Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal se sont montrés tous deux particulièrement passionnés par les sondages, en commandant très régulièrement et adaptant leurs déclarations et leur apparence en fonction des résultats. Au lieu de se servir de cet outil juste comme un baromètre, les candidats ont fait des sondages des diktats auxquels ils se sont complètement soumis.

*** Liens

Série : "La revanche de l'opinion"
1. La revanche de l'opinion : l'importance des sondages dans la vie politique
2. Emotions et arguments : comment se forger une opinion ?
3. Les divisions de l'opinion : ceux qui votent, ceux qui s'abstiennent
4. Le rôle de la télévision et de la radio dans la formation de l'opinion
5. Divertissement et humour en politique : l'autre manière de toucher l'opinion

> Roland Cayrol, La Revanche de l'opinion, Médias, sondages, Internet, Editions Jacob-Duvernet, 205 p., 2007

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