Cigares, hôtels de luxe et voyages à l'étranger : les élus locaux sont-ils vraiment moins dépensiers que les autres ?

L'argent du pouvoir · 22 mar. 2011 à 08:58

Dépenses des élus locaux

On se souvient des cigares de Christian Blanc, du jet privé d'Estrosi ou de ses deux appartements de fonction. Ces révélations font le pain hebdomadaire du Canard enchainé et reflètent la tendance des politiques à confondre les deniers publics avec leur argent de poche. Mais les élus locaux sont-ils plus vertueux ? Si les projecteurs sont systématiquement braqués sur les ministres ou les députés, les affaires de cigares ou d'hôtels de luxe facturés à la collectivité n'épargnent pas les élus locaux.



A l'occasion de la sortie du livre de Vincent Quivy, Chers élus, ce qu'ils gagnent vraiment (Seuil), nous publions une série de 20 questions insolites sur les revenus des élus locaux et nationaux. Exemples : comment obtenir 600 000 euros de parachute doré en étant simple directeur de société d'économie mixte ? Comment un député peut-il devenir propriétaire sans dépenser le moindre euro ? Pourquoi est-il si difficile de connaître le salaire exact d'un ministre ?

Episode 5 : Les dépenses des élus

L'argent du pouvoir, saison 3

Des frais remboursés sur présentation de justificatif

Comme nous l'avions déjà vu, les élus locaux peuvent bénéficier d'une indemnité couvrant les frais de représentation. Mais il faut croire que ce n'est pas toujours suffisant puisqu'ils peuvent, en plus, se faire rembourser différents frais : de transport, d'hébergement ou autres. Seule condition : il faut fournir un état de frais et soumettre la demande de remboursements au conseil municipal. Des gardes fous visiblement pas insurmontables si l'on en croit l'enquête de Vincent Quivy.

L'affaire des cigares du conseil régional de Picardie

Ainsi, en 2005, le président du conseil régional de Picardie s'est fait épingler pour sa consommation de havanes. Il a jugé bon "de consacrer une partie du budget régional à approvisionner la cave à cigares de l'assemblée qu'il dirige, explique Vincent Quivy. Il en a coûté 21 600 euros en 2005 à l'institution selon la presse et seulement 14 777 euros en trois ans selon le président mis en cause".
Juste à titre de comparaison, l'ancien secrétaire d'Etat au Grand Paris, Christian Blanc, a été contraint à la démission pour des cigares payés par son ministère pour un montant de... 12 000 euros.

20 000 euros d'hôtel à Marseille

Vincent Quivy cite un autre exemple, celui du président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte-D'azur qui aime les hôtels de luxe. Malgré la voiture de fonction à sa disposition et la petite heure de trajet entre son domicile et le siège du conseil situé à Marseille, l'élu a préféré être logé dans un hôtel avec vue sur le vieux port. Montant de la facture : 20 000 euros. Et les élus de la collectivité territoriale ont d'autant moins rechigné à rembourser des frais qu'ils bénéficiaient eux-mêmes de quelques largesses. Un rapport de la chambre régionale des comptes, daté de 2005, indiquait que les élus du conseil régional avaient dépensé en deux ans près de 59300 euros "correspondant à des repas pris dans des restaurants marseillais" et plus de 35000 euros "correspondant à des repas livrés au siège du conseil régional".

Des voyages d'études en Écosse ou en Jordanie

Les rapports des chambres régionales des comptes révèlent également l'existence de curieux voyages d'études dont l'utilité pour la collectivité n'est pas manifeste. Vincent Quivy cite par exemple le cas des élus du syndicat départemental du Cher en 2004, qui ont multiplié les voyages d'étude officiellement pour s'inspirer des modèles étrangers. Ainsi, le directeur du syndicat et 21 élus ont passé cinq jours Ecosse. Coût pour le syndicat : 17200 euros. Les années suivantes, direction Israël, la Jordanie, Madagascar pour des coûts qui varient entre 17000 et 30000 euros. Des dépenses contestées par la chambre régionale des comptes pour qui ces voyages "se sont écartés d'un strict intérêt syndical". Même si la cohésion des heureux élus en ressortait renforcée ?
Cet exemple n'est pas un cas isolé. Sous couvert d'études sur le développement durable, des conseillers régionaux de Rhône-Alpes de sont rendus au Brésil ou au Pays de Galles.

Par chance, ces élus locaux bénéficient du silence relatif qui entoure ces largesses. Il est toujours plus facile de vendre du papier avec des affaires qui touchent des politiques de premier plan que de suivre les aventures d'élus inconnus du grand public.

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