Elections 2007 : la déroute de l'extrême droite

Zapping radio · 15 juin 2007 à 17:12

Echec du Front National

L'affront des élections de 2002 a été en partie lavé avec les défaites successives de l'extrême droite lors de l'élection présidentielle et des élections législatives de 2007. Le Front National a chuté et retrouvé son plus bas niveau depuis plus de 20 ans. Comment expliquer cet effondrement si rapide ? Est-ce la fin de l'extrême droite ? Autant de questions auxquelles a tenté de répondre Olivier Duhamel dans sa chronique sur France Culture.

Triple fiasco pour l'extrême droite

Ces élections législatives marquent un troisième fiasco pour le Front National. Le 22 avril, Jean-Marie Le Pen est passé de 17% des voix (2002) à 10% (2007). Pendant la campagne du deuxième tour, il avait appelé ses électeurs à s'abstenir. Nouveau fiasco, le 6 mai, ils ont voté en majorité pour Nicolas Sarkozy. Pour les élections législatives, le 10 juin, le Front National a réalisé son plus bas score depuis 20 ans avec 4,5% des voix. D'ordinaire, le Front National perd 1/3 de ses voix entre une présidentielle et les élections législatives. Cette fois-ci, c'est une baisse de plus de 60% qui a eu lieu entre le 22 avril et le 10 juin. Au premier tour de ces législatives, les candidats d'extrême droite ont recueilli 1 200 000 voix, soit 2 600 000 de moins qu'au premier tour de la présidentielle pour Le Pen. On assiste donc à une véritable débâche du Front National pour ces élections de 2007.

Les facteurs de cette déroute électorale

Les causes de cet effondrement de l'extrême droite sont multiples. Tout d'abord, le contexte politique était moins favorable pour Le Pen. Les élections de 2007 n'intervenaient pas au lendemain d'une cohabitation comme en 2002 où il était plus facile de dénoncer les élites politiques au pouvoir puisque Chirac était président et Jospin Premier ministre. En 2007, il n'y avait aucun président ou Premier ministre sortant.
L'effondrement du Front National est également lié à la stratégie de Nicolas Sarkozy qui, depuis 2002, s'est donné comme principal objectif, celui de récupérer les voix des électeurs d'extrême droite. En menant une campagne très à droite sur l'immigration, l'identité nationale, l'insécurité, le candidat de l'UMP a réalisé une véritable OPA sur l'électorat frontiste. Il est même allé jusqu'à reprendre les expressions de Le Pen. Quelques mois plus tôt, il avait repris à son compte le slogan "La France, tu l'aimes ou tu la quittes" et il avait même parlé de "bandes ethniques" à propos des émeutes de banlieue en 2005.
Enfin, Jean-Marie Le Pen a sans doute livré le combat de trop en se présentant une nouvelle fois en 2007. Vieilli, fatigué, âgé de 78 ans, il est apparu complètement décalé par rapport aux deux principaux candidats, Royal et Sarkozy ayant 30 ans de moins.

Législatives 2007 : une seule candidate FN au second tour

Sur 577 circonscriptions, le FN ne se maintient au second tour que dans celle du Pas de Calais où se présente Marine Le Pen. La fille de Le Pen a réalisé plus de 20% des voix et est la seule rescapée d'extrême droite pour le second tour même si elle n'a aucune chance de gagner. Cette réussite est une aubaine pour Marine Le Pen, elle qui a été désignée comme la principale responsable de l'échec de son père à la présidentielle par de nombreux responsables d'extrême droite en raison d'une stratégie de banalisation du FN qui lui aurait porté préjudice. En améliorant le score du FN aux législatives par rapport à la présidentielle, Marine Le Pen se replace en bonne position pour la succession de son père à la tête du parti d'extrême droite lorsque ce dernier passera la main.

La fin de l'extrême droite ?

Cette chute du Front National lors de ces élections de 2007 marque-t-elle la fin de l'extrême droite ? L'histoire de ce courant politique qui n'est pas comme les autres est une succession de déclin et de renaissance. Si le reflux est réel, la rapidité avec laquelle le FN a chuté indique que le contraire n'est pas à écarter. Présent au second tour de la présidentielle en 2002, l'extrême droite s'est effondrée cinq ans plus tard. Un retour n'est pas à exclure aux élections suivantes même si, à l'heure actuelle, le FN se trouve considérablement affaibli.
Ses électeurs ayant rejoint Nicolas Sarkozy, le FN ne peut qu'espérer un échec du nouveau chef de l'Etat pour retrouver son niveau de 2002. Mais si Nicolas Sarkozy réussit, l'extrême droite française devra alors choisir entre deux stratégies : préserver son identité au risque de s'isoler et de devenir un groupuscule ou alors pratiquer l'ouverture politique vers la droite en cherchant une stratégie d'alliance avec l'UMP.

Défaite politique et victoire idéologique

L'effondrement politique de l'extrême droite ne signifie pas la fin de ses idées. L'antisémitisme et le racisme n'ont jamais été aussi présents dans la société. Si le FN a baissé, c'est en partie parce que ses idées et son vocabulaire ont été récupérés. La "banalisation" de l'extrême droite est acquise dans la sphère médiatique comme l'a montré l'invitation douteuse de Le Pen a l'émission de politique people de M6 pendant la campagne présidentielle. Si l'extrême droite a perdu la bataille politique, elle a gagné en partie celle des idées. Ce n'est pas forcément le plus rassurant.

*** Liens

Encyclopédie
- Biographie de Jean-Marie Le Pen
- Les mots de la campagne : identité nationale et préférence nationale

Actualités
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