Il y a un an, la Cour des comptes dénonçait le coût exorbitant du nouveau bâtiment des services de renseignement

breve · 7 mar. 2009 à 18:48

Bâtiment de la DCRI

Nous vous en parlions le 04 mars 2008. Le rapport 2008 de la Cour des comptes avait révélé que le nouveau bâtiment hautement sécurisé de la DCRI (Direction Centrale du Renseignement Intérieur) avait eu un coût exorbitant. En septembre 2007, la ministre de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie, avait inauguré le nouveau bâtiment des services de renseignement français situé à Levallois-Perret. La fusion des RG (Renseignements Généraux) et de la DST (Direction de la Surveillance des Territoires) avait été décidée par Nicolas Sarkozy. Le choix de la ville de Levallois-Perret n'était pas le fruit du hasard, puisque cette commune est administrée par Patrick Balkany, ami intime de Nicolas Sarkozy.

Or, selon la Cour des comptes, l'Etat aurait pu économiser plus de 40 millions d'euros s'il avait mieux gérer le dossier. La cour présidée par Philippe Séguin avait notamment signalé trois problèmes :

1. Pas d'appel d'offre pour l'implantation du site

Premier problème : l'implantation du nouveau bâtiment des services de renseignements s'est faite sans appel d'offre. Il apparait que le bâtiment situé à Levallois-Perret n'avait pas le meilleur rapport qualité/prix. Deux autres sites semblaient disposer de plus d'atouts mais aucun appel d'offre n'a eu lieu.

2. Un loyer payé à un intermédiaire

Deuxième problème : le loyer est très élevé. En 2005, une fois le choix du site arrêté, l'Etat a négocié le loyer avec le propriétaire du bâtiment pour un bail d'une durée de 12 ans. Un premier chiffre a circulé : 9 millions d'euros par an, hors taxe. Mais, contre toute attente, un mois après, le propriétaire du bâtiment décide finalement de le vendre, plutôt que de le louer. Faute de montage financier crédible, l'Etat n'a pu se porter acquéreur et a dû avoir recours à un intermédiaire, le groupe privé "Icade", qui a acheté le bâtiment pour le louer à l'Etat. La cour des comptes a donc relevé une anomalie : l'Etat a tout financé mais a délégué la transaction à un acteur privé sans avoir recours à une étude préalable.
Or, le prix du loyer aurait flambé entre temps et l'option d'achat du bâtiment par l'Etat en 2026 à cette société privée aurait considérablement alourdi la note. En clair, selon le rapport de la cour des comptes, si l'Etat s'était porté acquéreur tout de suite, au lieu de passer par cette société privée, il aurait économisé environ 40 millions d'euros, par rapport à l'accord actuel.

3. D'importants travaux à réaliser

Pire, le nouveau bâtiment nécessite d'importants travaux pour que les services de renseignement soient pleinement opérationnels. Et le ministère de l'Intérieur aurait mal évalué le coût de ces travaux, qui aurait augmenté de plus de 70% en quelques mois. Les travaux seront "longs et coûteux" selon le rapport de la Cour des comptes. Les rapports de la Cour des comptes sont souvent longs et fastidieux. Ces données chiffrées sont parfois obscures et peu exploitées par les médias. Pourtant, on peut s'étonner de l'improvisation avec laquelle le choix de ce bâtiment, sur ce site, a été fait, au nom d'un clientélisme qui apparaît évident. Mais cela, le rapport de la Cour des comptes ne pouvait l'affirmer explicitement.

En juin 2008, le Figaro avance le chiffre de 366,2 millions d'euros

Trois mois après la publication de notre article, Le Figaro publiait une enquête intitulée "La DCRI : un FBI à la française". On apprenait alors que le bâtiment avait coûté 366,2 millions d'euros.
"Une soixantaine d'immeubles ont été étudiés et dix visités avant que le site de Levallois-Perret, anciennement occupé par Euro RSCG, ne soit retenu en location avec une option d'achat supposée intervenir le 31 décembre 2026. Coût de cette opération pour l'État : 366,2 millions d'euros. «Particulièrement élevé», note la Cour des comptes qui épingle par ailleurs des «travaux longs et coûteux». «La sécurité des Français n'a pas de prix», répond un haut fonctionnaire."

Si la sécurité des Français n'a pas de prix, elle a manifestement un coût.

Le Figaro et la DCRI



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