10 mai 1981 : François Mitterrand est élu président de la République après 23 ans d'opposition

Rétrospectives · 5 mar. 2008 à 23:49

10 mai 1981

Sept ans après avoir perdu à 424 000 voix près au deuxième tour de la présidentielle, François Mitterrand est de nouveau candidat à l'élection présidentielle en 1981. A 65 ans, il en est à sa 3ème candidature. Au cours de la campagne, le rapport de force va basculer en sa faveur. Il va notamment pouvoir compter sur le soutien indirect de Jacques Chirac, qui va tout faire pour faire chuter Valéry Giscard d'Estaing et devenir ainsi le leader de la droite. Le 10 mai 1981, François Mitterrand est élu président de la République, après 23 ans d'opposition.


François Mitterrand a eu plusieurs vies : un passé trouble pendant la guerre, une carrière de ministres sous la IVe République, 23 ans d'opposition avant devenir le premier, et pour l'instant l'unique, président de gauche de la Ve République. A cette vie professionnelle si remplie s'ajoutait une double vie personnelle et une personnalité énigmatique. Homme de lettres, souvent distant, le 4ème président de la Ve République fascine encore aujourd'hui, 12 ans après sa mort.

Politique.net publie la biographie de François Mitterrand sous la forme d'un feuilleton en 15 épisodes, du 25 février au 10 mars 2008.

9ème épisode : Election du premier président de gauche de la Ve République

Mitterrand et le pouvoir

La campagne électorale de 1981

Lors de la campagne présidentielle de 1981, quatre principaux candidats s'affrontent. Deux candidats de droite avec Valéry Giscard d'Estaing et Jacques Chirac ; et deux candidats de gauche avec François Mitterrand et Georges Marchais. La campagne a été marquée par cette double bataille : la majorité sortante est très divisée et les hostilités à gauche sont bien plus fortes que prévu. Au sein de leur propre camp, Valéry Giscard d'Estaing et François Mitterrand ont dû batailler dur.
Le principal thème de la campagne fut l'emploi. Chacun a fait des promesses très précises : Giscard promettait de créer 1 million d'emplois d'ici à 1985, Chirac 500 000 emplois en période de croissance, et François Mitterrand 210 000 par an dont 150 000 dans le secteur public.
Les sondages ont rythmé la campagne. Valéry Giscard d'Estaing, parti de 34% d'intentions de vote en décembre 1980 n'a cessé de baisser pour finir à 26,5% un mois avant le scrutin. En revanche, François Mitterrand n'a cessé d'augmenter dans les sondages : il est passé de 21% d'intentions de vote en décembre 1980 à 24% en avril 1981. A deux semaines du scrutin, Giscard d'Estaing conservait donc une légère avance sur Mitterrand, comme en 1974.
Au soir du premier tour, Valéry Giscard d'Estaing arrive en première position mais d'une courte tête avec 28,31% des voix contre 25,84% pour François Mitterrand. Le président sortant a perdu 4 points par rapport à 1974. Deuxième surprise : le score du Parti Communiste est le plus faible de son histoire, avec moins de 16% des voix pour Georges Marchais.
La configuration du second tour est donc la suivante : la position de Giscard d'Estaing est plus fragile que prévu et les reports de voix à droite vont s'avérer compliquer, Chirac jouant en secret la victoire de Mitterrand pour devenir le leader de l'opposition de droite et écarter définitivement Giscard d'Estaing de sa route. A gauche, la contre-performance du Parti Communiste vient balayer les critiques sur la « menace communiste » en cas de victoire de François Mitterrand.

Débat du 5 mai 1981 : la revanche Mitterrand/Giscard d'Estaing

Le deuxième débat de l'histoire de la Ve République entre les deux finalistes pour l'élection présidentielle est une sorte de revanche. On résume souvent ce débat à cette phrase de François Mitterrand : "Vous reprenez le refrain de l'homme du passé, c'est quand même ennuyeux, que vous dans l'intervalle, vous soyez devenu l'homme du passif".
Mais on oublie les premières minutes du débat qui ressemblent à un remake de 1974. Giscard d'Estaing prend la parole pour demander à Mitterrand avec quelle majorité il compte gouverner. Mais cette fois-ci, Mitterrand ne se laisse pas faire et enchaîne une série de citations assassines de Jacques Chirac contre Valéry Giscard d'Estaing. La réplique était préparée et avait pour but de montrer que la majorité de Giscard d'Estaing n'était pas aussi solide qu'il voulait le dire.
Au lendemain du débat, la position de Giscard d'Estaing apparaît toujours aussi fragile. En 1974, l'élection s'était jouée à 424 000 voix près. Cette fois-ci, François Mitterrand est convaincu de sa victoire.

Débat Giscard/Mitterrand, le 5 mai 1981

10 mai 1981 : François Mitterrand, élu Président de la République

Le 10 mai 1981, François Mitterrand est élu président de la République face à Valéry Giscard d'Estaing, avec 51,76% des suffrages. Il désigne Pierre Mauroy Premier ministre et le charge de s'occuper de la campagne législative pour assurer au parti socialiste une large majorité. Finalement, la vague rose inonde la France en juin 1981, au-delà de toute espérance. Pierre Mauroy forme son deuxième gouvernement et fait appel à quatre communistes. Encore une fois, le Président marque sa volonté de former une gauche unie.

Passation de pouvoir entre Mitterrand et Giscard

La constitution de la garde rapprochée de François Mitterrand

A l'Elysée, François Mitterrand constitue sa garde rapprochée : Jacques Attali, son plus proche conseiller, Jean-Louis Bianco, Hubert Védrine, conseiller diplomatique, Christian Sautaire, conseiller économique, Elisabeth Guigou, conseillère pour les finances extérieures, Michel Charras, conseiller pour les affaires institutionnelles, Jean Glavany, chef de cabinet et François de Grossouvre des services secrets. Mais François Mitterrand refuse l'idée de posséder un cabinet présidentiel, pour élaborer des réunions avec ses collaborateurs. Pour lui, les conseillers n'ont pas de légitimité politique mais sont très importants parce qu'ils lui apportent des réflexions. Ils ne doivent pas constituer une sorte d'organe délibérant. Ce sont aux élus et au gouvernement de prendre des décisions pour l'Etat. Le Président travaille en étroite collaboration avec ses conseillers mais ne leur donne jamais tous les fils d'un dossier, conservant ainsi une certaine discrétion.

Pendant deux ans, François Mitterrand va bénéficier d'un Etat de grâce dans l'opinion qui va lui permettre de mettre en oeuvre les réformes les plus emblématiques de son programme.

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