Quel avenir politique pour François Bayrou ?

Enquête · 13 sep. 2007 à 20:41

L'avenir politique de Bayrou

François Bayrou fait sa rentrée politique au "Forum des démocrates" de Seignosse où sont attendus plus de 2000 adhérents du MoDem. Silencieux pendant l'été, le troisième homme de l'élection présidentielle prépare le congrès fondateur de son nouveau parti et les élections municipales de mars 2008 sans oublier son objectif principal : 2012. Quels sont les atouts politiques et les faiblesses de François Bayrou ?

L'éclatement du Centre : MoDem contre Nouveau Centre

En choisissant de rompre son alliance avec la droite traditionnelle, François Bayrou a confirmé son autonomie politique au risque d'éclater le Centre. Ses anciens alliés qui ont rejoint Nicolas Sarkozy ont créé un autre parti, "Nouveau Centre", qui a remporté 20 sièges de députés quand le MoDem n'en remportait que 4. Sans alliance de parti, le MoDem est isolé et peut difficilement gagner les élections de second tour.
Mais paradoxalement, alors que le MoDem n'a que 4 élus et le Nouveau Centre en a 20, le parti de François Bayrou devrait recevoir une subvention publique et le Nouveau Centre aucune. Selon les règles du financement des partis politiques, il faut obtenir plus de 1% des voix dans au moins 50 circonscriptions pour prétendre à une subvention publique. Le MoDem remplit ses conditions, le Nouveau Centre semble ne pas être en mesure de les remplir. Dans la bataille MoDem/Nouveau Centre, Bayrou a perdu politiquement mais remporté une victoire financière.

Le problème des alliances aux élections

Le Centre étant divisé, la question des alliances se pose désormais pour François Bayrou. Sans alliance, le MoDem a montré qu'il ne pouvait pas gagner d'élections. Aux législatives, le MoDem n'a obtenu que 4 députés alors que François Bayrou avait rassemblé près de 7 millions de voix à la présidentielle.
Si le MoDem revendique aujourd'hui près de 45 000 adhérents, l'influence politique du parti dépend de ses élus. Et le parti ne peut avoir d'élus qu'en ayant des stratégies d'alliance claires. Dans une configuration classique, UMP-PS-MODEM, le MoDem n'est pas en mesure de bousculer les deux grands partis de gauche et de droite. François Bayrou devra donc choisir s'il veut sortir de cet isolement.

L'ouverture de Sarkozy : du bayrouisme ?

Lors de l'élection présidentielle de 2007, François Bayrou avait axé sa campagne sur une stratégie d'ouverture à l'égard de la droite et de la gauche. Il renvoyait dos à dos le PS et l'UMP dans leurs luttes de clan et se posait en position d'arbitre : les problèmes de la France sont si graves que droite et gauche doivent être capables de s'entendre sur les principaux dossiers. Il proposait en quelque sorte un gouvernement d'Union nationale dans lequel il serait le centre de gravité.
Pendant la campagne, lorsque des journalistes évoquaient l'absence d'alliance de l'UDF et la difficulté qu'il aurait à composer un gouvernement en cas de victoire à la présidentielle, François Bayrou répétait sans cesse qu'il rassemblerait des hommes politiques compétents qui viendraient des deux camps. Depuis la fin de la présidentielle, Nicolas Sarkozy a appliqué la stratégie de Bayrou en pratiquant l'ouverture politique : Bernard Kouchner, Martin Hirsch, Fadela Amara sont au gouvernement. L'ancien secrétaire général de François Mitterrand, Hubert Védrine, a accepté de rédiger un rapport. Jacques Attali, Jack Lang et Michel Rocard participent à des commissions.
Même si François Bayrou aura beau jeu d'affirmer que cette ouverture politique est marginale et ne concerne que des personnalités qui étaient déjà en marge de la gauche, rien ne permet de dire qu'il aurait pu faire mieux en terme d'ouverture. Avec cette politique d'ouverture, François Bayrou perd donc ce qui faisait sa spécificité pendant la campagne présidentielle.

Municipales : le risque d'une candidature à Pau

François Bayrou doit résoudre un dernier problème : combler le temps politique d'ici à 2012. Si le leader du Centre est déterminé à se présenter pour la prochaine élection présidentielle, il ne peut rester dans une position d'attente pendant 5 ans avec son seul mandat de député. Pour exister dans la vie politique et médiatique face à un Nicolas Sarkozy omniprésent, François Bayrou doit prendre des risques.
D'ici à 2012, il y a 3 échéances électorales : les municipales de 2008, les européennes de 2009 et les régionales de 2010. D'une manière ou d'une autre, François Bayrou devra être présent pendant ses scrutins. Pour les régionales, le MoDem ne parait pas en position de récupérer une seule région étant donné que le PS en détient déjà 20 et que le MoDem veut faire du PS un allié politique. Aux élections européennes, le fédéralisme de Bayrou paraît décaler par rapport au scepticisme des Français qui s'est exprimé avec le rejet de la constitution européenne.
Il reste donc les municipales de 2008. Le président de l'UDF-MoDem a déclaré qu'il réfléchissait à une candidature à la mairie de Pau. Une victoire lui permettrait de donner une nouvelle dimension à sa carrière politique et de patienter jusqu'en 2012 en faisant de Pau son laboratoire d'idées. Mais une défaite de François Bayrou signifierait une seconde mort politique pour lui : sans allié, avec peu d'élus à l'Assemblée, échouant aux municipales, François Bayrou verrait son avenir politique sombrer un peu plus. Mais peut-il encore se payer le luxe du choix de la prudence ?

*** Liens

Encyclopédie
- Biographie de François Bayrou
- Histoire de la création de l'UDF

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Vidéos en ligne
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