Les campagnes sénatoriales ne sont soumises à aucun contrôle financier

Revue de presse · 23 août 2010 à 21:49

Les dépenses des Sénatoriales

Les journalistes font parfois des découvertes surprenantes. Le site internet Mediapart a révélé fin juillet une information peu connue des citoyens : les candidats aux sénatoriales ne sont contraints à aucun contrôle financier. Toutes les campagnes sont soumises à des règles très précises, que ce soit la présidentielle, les régionales comme les législatives. Toutes, sauf les sénatoriales. Les candidats peuvent disposer d'autant d'argent qu'ils le souhaitent pour financer leur campagne.





Dans la torpeur de l'été, certaines informations ont pu vous échapper...

Politique.net, été 2010

Les règles à respecter

La législation concernant le financement des élections sénatoriales toutefois est particulièrement succincte. Jusqu'aux années 2000, il n'y avait aucune règle. Il a fallu attendre la loi du 10 juillet 2000 qui interdit aux candidats sénatoriaux le financement des campagnes par des entreprises ou des personnes morales, autres que des partis ou groupements politiques. Il leur est également interdit d'avoir recours à une aide provenant d'une personne morale ou d'un État étranger. Pour le reste, il n'y aucune obligation comptable.

Pourquoi les comptes de campagne ne sont-ils pas contrôlés ?

Contrairement au président de la République ou aux députés par exemple, les sénateurs ne sont pas élus au suffrage direct. Ce sont les grands électeurs, c'est-à-dire les députés, conseillers régionaux, conseillers généraux et conseillers municipaux, qui élisent les sénateurs. Les grands électeurs ne sont que 150 000. Par conséquent le site du Sénat rappelle « que les dépenses de propagande électorale pour une élection sénatoriale sont sans commune mesure avec celles d'une campagne pour une élection législative, puisque les réunions électorales sont réservées aux seuls membres du collège électoral sénatorial, c'est-à-dire à un nombre limité de personnes. C'est la raison pour laquelle le code électoral contient peu de dispositions relatives au financement des campagnes sénatoriales ».
Puisqu'ils sont peu nombreux et que cela demande un minimum d'organisation, la campagne est censée être peu coûteuse et ne s'étendre que sur six semaines. Voilà pourquoi, hormis les deux règles à respecter sur la provenance du financement des campagnes sénatoriales, les contrôles n'existent pas.

Vers une plus grande déontologie

Pour contrôler les dépenses lors des campagnes, tout candidat peut, mais sans obligation, « désigner un mandataire financier, l'usage abusif de certains moyens de propagande pouvant constituer un motif d'annulation de l'élection.
Toutefois, rappelle le site du Sénat, une incertitude demeure quant à la période à laquelle s'applique cette interdiction de financement par une personne morale. [...] Plusieurs questions écrites ont été adressées au ministère de l'intérieur pour clarifier ce point de droit. Elles n'ont reçu à ce jour aucune réponse ».
Certains candidats souhaitent plus de transparence pour éviter les soupçons. Mediapart cite le cas d' « Anne-Marie Escoffier (apparentée au Parti radical de gauche), qui s'est auto-disciplinée en 2008 (pour sa première élection), en désignant un mandataire financier, en ouvrant un compte bancaire spécifique. «Nous devons faire campagne dans les mêmes conditions qu'un député, avec des règles identiques de vérification des comptes, la même transparence ; c'est essentiel pour la crédibilité du Sénat ».»
En effet, les abus existent en l'absence de contrôle : certains candidats profitent de leur statut d'élus locaux pour financer leur campagne. Ils utilisent voitures et autres avantages en nature à leur profit, au détriment de candidats qui n'ont aucun mandat et ne bénéficient donc pas des mêmes privilèges.

Financement des Sénatoriales



Le manque de contrôle et de règles concernant le financement des campagnes sénatoriales crée des inégalités entre les candidats. Les plus aisés peuvent allègrement financer leur campagne et organiser fêtes et réunions, tandis que d'autres peuvent se servir de leur statut d'élus locaux pour bénéficier de différents avantages les aidant dans leur campagne. En 2009, l'ancien président du Conseil constitutionnel, Pierre Mazeaud, a remis à l 'Assemblée un rapport, « Propositions de réforme de la législation sur le financement des campagnes électorales pour les élections législatives », encourageant une évolution des règles du financement des campagnes sénatoriales. Selon Mediapart, de nombreux sénateurs seraient favorables à cette réforme sauf le groupe UMP qui n'a pas souhaité répondre au journaliste. Affaire à suivre, donc.


Par Anne-Sophie Demonchy

*** Liens

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