Zapatero, Sarkozy, Royal, Libération : qu'a vraiment dit le président de la République ?

Revue de presse · 22 avr. 2009 à 16:20

Sarkozy et Zapatero

La polémique sur les propos tenus par Nicolas Sarkozy sur le Premier ministre espagnol est un modèle du genre. A l'origine, il y a une citation, puis une reprise par la presse étrangère, une récupération par Ségolène Royal, une contre-attaque en deux temps de l'Elysée et de l'UMP, et la réponse de Libération après les attaques de la majorité. A chaque étape, la polémique enfle, ce qui relève de l'anecdote devient une "affaire" à plusieurs tiroirs, tout le monde en rajoute, et plus rien ne devient audible. Après plusieurs jours de polémiques, le soufflet retombe sans vraiment que l'on comprenne ce qui s'est passé.


A partir du texte de Libération, du suivi de la polémique par Arrêt sur Images, et de l'épilogue (?) avec la version longue du Canard Enchaîné, nous allons vous raconter comme un simple « off » s'est transformé en polémique de la semaine.

Trois lignes extraites d'une pleine page de Libération

L'histoire est assez simple. Dans un article de Libération intitulé "Sarkozy se voit en maître du monde", le journal rapportait des propos du président de la République. Le 15 avril 2009, le chef de l'Etat avait invité à déjeuner 12 députés et 12 sénateurs. Comme à chaque fois, les invités ont ensuite raconté le déroulement du déjeuner en rapportant les propos des uns et des autres. Ces "off", "commentaires" et autres "propos rapportés" font partie de l'actualité politique quotidienne. Les lecteurs du Canard Enchaîné, des indiscrets de l'express, des off de Bakchich, des brèves du Point, n'ont donc pas été surpris par l'article de Libération dont voici le passage qui a créé la polémique : "On peut dire beaucoup de choses sur Zapatero" remarque Emmanuelli. "Il n'est peut-être pas très intelligent. Moi, j'en connais qui étaient très intelligents et qui n'ont pas été au second tour de la présidentielle" s'amuse Sarkozy en allusion à Lionel Jospin." A lire ces propos, l'attaque visait donc Lionel Jospin.

Libération - Sarkozy et Zapatero

Excuses de Ségolène Royal, contre-attaque de la majorité et défense de Libération

La presse internationale a repris les propos cités par Libération en affirmant que Nicolas Sarkozy s'en était pris au Premier ministre espagnol. Ségolène Royal a profité de cette reprise pour s'excuser auprès de Zapatero. L'Elysée a d'abord démenti les propos, l'UMP s'en est pris à Libération par la voix de Frédéric Lefebvre, puis l'UMP a affirmé que les propos étaient sortis de son contexte, confirmant implicitement qu'ils avaient été tenus.
Le directeur de Libération, Laurent Joffrin, a réglé ses comptes avec Frédéric Lefebvre sur l'antenne de France Inter :



Quant à Ségolène Royal, elle s'est expliquée au journal de 20 heures de France 2 sur les nouvelles excuses (après celles de Dakar) qu'elle avait faites. "Chaque fois qu'il y aura un manquement à cette éthique du respect, eh bien, en effet, je prendrai la parole pour défendre les valeurs auxquelles je crois" a-t-elle expliqué. Cette fois-ci, elle n'a pas été suivie par ses amis politiques, Vincent Peillon prenant par exemple ces distances avec les excuses précipitées de Ségolène Royal.

asi - excuses de Ségolène Royal

Le Canard Enchaîné publie la version longue de l'échange

Mais qu'a vraiment dit Nicolas Sarkozy ? Dans son édition du 22 avril 2009, le Canard Enchaîné publie une version plus longue de l'échange entre Nicolas Sarkozy et des parlementaires :

"Ses 24 invités à déjeuner (...) réunis dans un groupe de travail sur la crise financière font silence. Provocateur, le chef de l'Etat lance à la cantonade : "Vous avez vu ? Zapatero annonce, ce matin, qu'il va supprimer la publicité sur la télévision publique espagnole. Zapatero, un socialiste hein..."
Le député Villepiniste : "Eh oui ! les socialistes aussi font des erreurs..."
Henri Emmanuelli, député PS des Landes : "On peut dire beaucoup de choses sur Zapatero, il y a à prendre et à laisser". Rebondissant sur ce propos peu amène, Sarko s'écrie : "Zapatero n'est peut-être pas très intelligent, mais lui, au moins, il gagne les élections. J'en connais des beaucoup plus intelligents, qui gouvernent pendant cinq ans, avec un bilan formidable, et qui ne gagnent pas les élections".

Le Canard Enchaîné - Sarkozy et Zapatero


Le verbatim du Canard Enchaîné indique bien que les propos tenus par Nicolas Sarkozy s'inséraient dans un dialogue dans lequel le président voulait se vanter de la reprise d'une de ses idées (suppression de la publicité) par le Premier ministre espagnol. Il voulait démontrer que les socialistes espagnols étaient mieux que les socialistes français. Et voilà comment des propos maladroits finissent par être compris dans le sens contraire et créent la polémique de la semaine en étant rapportés dans la presse.

*** Liens

- L'actualité politique vue par Le Canard Enchaîné : les off et propos rapportés
- Excuses de Ségolène Royal : Xavier Darcos ironise et l'imite sur Canal +
- Comment Nicolas Sarkozy était-il perçu à l'étranger en 2008 ?
- Vidéo @si : les dialogues improvisés de Nicolas Sarkozy sur le terrain

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Vidéo : Le "off" de Nicolas Sarkozy sur Franc 3

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