Un régime en crise ?

Ve République : présentation du régime

Une succession de cohabitations depuis 1986

Le Pen, 2eme de la présidentielle 2002

La constitution de la Ve République, rédigée sous l'impulsion de De Gaulle, devait donner au président de la République l'essentiel des pouvoirs pour ne pas sombrer dans l'instabilité ministérielle de la IVe République. Ce régime se caractérise donc par un pouvoir exécutif fort. Or, en 1986, la droite gagne les élections législatives et peut prétendre à prendre la tête d'un gouvernement alors que le président en exercice, François Mitterrand, est de gauche. C'est la cohabitation : l'exécutif a désormais deux dirigeants, de camp opposé. Tantôt plébiscitée par les Français qui y voient un équilibre des pouvoirs, souvent décriée car paralysant l'action politique, la multiplication des cohabitations ces dernières années (2ème cohabitation entre 1993 et 1995 et 3ème cohabitation entre 1997 et 2002) modifie la nature des institutions. C'est pour limiter les risques de cohabitation que le mandat du président de la République est passé de 7 ans à 5 ans pour faire coïncider l'élection présidentielle et les élections législatives. Les deux élections se déroulant à un mois d'intervalle, on peut estimer que le risque que les Français votent pour deux camps différents est moindre. Cette réforme du quiquennat a été approuvée par référendum à hauteur de 73% en septembre 2000.

Une crise de la représentation

Cette multiplication des cohabitations a tendance à brouiller les clivages politiques : sur beaucoup de questions, les différences entre la gauche et la droite n'apparaissent plus comme des évidences. En 1995, la campagne de Jacques Chirac centré sur un concept un peu flou de « fracture sociale » était une campagne située plutôt au centre qu'à droite. De même, sur la question des privatisations par exemple, alors que la gauche défendait auparavant le maintien d'entreprises publiques, détenues à 100% par l'Etat, le gouvernement de Lionel Jospin entre 1997 et 2002 a procédé à de nombreuses privatisations.
A cette impression qu'il n'y a plus de différences entre la droite et la gauche s'ajoutent les nombreux procès concernant des hommes politiques pour corruption. Jacques Chirac est par exemple cité dans un certain nombre d'affaires judiciaires mais, par son statut de chef d'Etat, il ne peut être jugé tant qu'il est président. Dès lors, on assite à une montée de l'abstention, les électeurs se déplaçant de moins en moins pour voter même pour les élections présidentielles qui sont pourtant les élections qui intéressent le plus les Français. L'abstention, au premier tour du scrutin présidentiel, était de 15,2% en 1965, 18,9% en 1981, 21,6% en 1995 et 28,5% en 2002. Parallèlement à cette montée de l'abstention, la crise de représentation se manifeste par la montée des extrêmes.

La montée des extrêmes

A droite, l'extrême droite ne cesse de progresser électoralement. Depuis juin 1984 et les élections européennes, le score du Front National n'a cessé de progresser jusqu'aux élections présidentielles de 2002 où Jean-Marie Le Pen, leader d'extrême droite, réalise 16,8% des voix au premier tour et accède pour la première fois de l'histoire de la Ve République au second tour d'une élection présidentielle.
A gauche, même si la nature des partis d'extrême gauche n'est en rien comparable à la menace du FN, des partis comme Lutte Ouvrière ou la Ligue Communiste Révolutionnaire réalisent des scores de plus en plus importants et privent ainsi les partis de gauche de gouvernement, le PS et le PC essentiellement, d'une partie de leurs électeurs. S'ensuivent un émiettement des voix, une multiplication des partis politiques, qui révèlent une crise de la représentativité et un scepticisme vis-à-vis des principaux partis politiques qui gouvernaient jusqu'à présent.

Vers une VIe République ?

Face à cette crise institutionnelle, certains hommes politiques avancent l'idée qu'il faut radicalement changer d'institutions et proposer une VIe République. Même si les propositions varient d'un camp à l'autre, on retrouve une certaine constance dans les propositions : ce nouveau régime devrait accorder plus de place à l'Assemblée nationale qui, ces dernières années, s'est transformée davantage en chambre d'enregistrement validant les décisions du gouvernement qu'en véritable pouvoir de décision. Le président, qui n'a pas de compte à rendre au parlement, est parfois considéré comme un monarque au pouvoir trop étendu. De fait, certains partisans d'une VIe République souhaitent que l'essentiel du pouvoir soit transféré au premier ministre, responsable lui devant le parlement, au détriment d'un président qui n'aurait plus que le rôle d'arbitre. Ainsi, il n'y aurait plus qu'un seul responsable réel du pouvoir exécutif, le premier ministre, comme dans la plupart des pays d'Europe (Grande Bretagne, Allemagne, Espagne, etc...).