La démission de Jacques Chaban-Delmas

Les années Pompidou

Des scandales qui s'accumulent à partir de janvier 1972

Jacques Chaban-Delmas

A partir de la fin 1971, une série de scandales vise indirectement le premier ministre. Cette campagne semble orchestrée par les services du ministère des finances, dirigés par Valéry Giscard d'Estaing et touche des proches du premier ministre. Mais en janvier 1971, Jacques Chaban-Delmas lui-même est mis en cause : le Canard Enchaîné, qui a forcément bénéficié d'une fuite du ministère des finances, révèle qu'il n'a pas payé d'impôts entre 1966 et 1969 en publiant la fiche de paie du premier ministre. Bien que ces exonérations fiscales soient légales, l'image de Jacques Chaban-Delmas est ternie.
Dans cette série de scandales politiques, un jeune membre du gouvernement est également touché : Jacques Chirac. Propriétaire d'un château en Corrèze, l'actuel ministre des relations aux parlements a bénéficié des crédits de l'Etat pour restaurer la batice puisque peu de temps après son acquisition, le monument a été classé « monument historique ». Cette manoeuvre est vite dénoncée par l'opposition et exploitée politiquement. La majorité est donc dans la tourmente en ce début d'année 1972. Même si Giscard, en tant que membre du gouvernement, ne peut que se montrer solidaire, ces proches n'hésitent pas à exploiter ces scandales pour dénoncer la dérive du pouvoir gaulliste.

Un référendum à moitié raté en avril

Après cette série de scandale, Pompidou souhaite reprendre la main et relégitimé son pouvoir. Pour y parvenir, il applique la même méthode de De Gaulle en cherchant à obtenir le soutien de la population par le biais d'un référendum. Le 16 mars 1972, il annonce un référendum sur un sujet qui pourtant ne fait pas débat : l'entrée de 4 nouveaux pays dans le marché commun européen. Ce référendum surprend tout le monde puisque, sur cette question, la majorité gaulliste, les centristes, les radicaux et les socialistes sont d'accords. Il espère ainsi une large victoire du oui au référendum et effacé de cette manière les difficultés qui s'accumulent pour son gouvernement.
Dénonçant cette manoeuvre électorale, les socialistes ne tombent pas dans le piège de ce vrai-faux référendum et décident d'appeler les électeurs à s'abstenir pour éviter de donner une large victoire du oui que le président présenterait comme une victoire personnelle. Le piège tendu par Pompidou se retourne donc contre lui : le oui l'emporte avec 68% des voix mais l'abstention n'a jamais été aussi élevée. Près de 40% des inscrits ne se sont pas déplacés, et 7% ont voté blancs ou nuls. En d'autres termes, la moitié des Français a refusé de répondre à la question.

La rupture entre Chaban-Delmas et Pompidou en juillet 1972

Avec ce demi-échec au référendum, la tension monte un peu plus entre le président de la République et le chef du gouvernement Jacques Chaban-Delmas dont la politique est de plus en plus contestée. Se sentant affaibli, le premier ministre cherche lui aussi à relégitimer son action en demandant un vote de confiance au parlement en mai 1972. Cet acte est perçu par Pompidou comme une volonté de la part du premier ministre de lui forcer la main pour le garder. Lors du vote de confiance, Jacques Chaban-Delmas obtient bien une majorité de voix au parlement mais le président de la République, Pompidou, ne peut accepter que l'Assemblée Nationale lui impose le maintien du gouvernement alors que dans la Ve République, c'est le président qui décide lui-même du nom du premier ministre. Pompidou pousse donc Chaban-Delmas à la démission le 5 juillet 1972.