La fin du septennat

Les années Giscard d'Estaing

Le deuxième gouvernement de Raymond Barre

Bokassa et Giscard à l'Elysée

Depuis 1976, l'action du premier ministre se devait d'être plus ou moins consensuelle en vue de la préparation des élections législatives de 1978. Avec la victoire de la droite, le président et le gouvernement disposent d'une plus grande marge de manoeuvre pour mettre en place une politique économique plus ambitieuse. Le gouvernement est reconduit presque dans son intégralité. Raymond Barre abandonne le ministère de l'Economie et des Finances au profit de deux ministres. René Monory est nommé ministre de l'économie. Maurice Papon, député RPR, ancien préfét de police de Paris dont le passé sous Vichy n'était pas encore connu, est nommé ministre du budget.

Une politique économique plus libérale

1978 marque un tournant vers une politique beaucoup plus libérale. Un des axes de cette politique est la défense de la libre concurrence et la libération des prix, qui étaient bloqués jusqu'à présent en raison des problèmes d'inflation (hausse des prix du marché liée à une forte consommation). Cette politique de libération des prix a fortement marqué l'opinion, notamment en raison de la libéralisation du prix du pain en août 1978, prix qui était fixé jusqu'à présent par l'Etat par l'intermédiaire de taxes depuis 1791. Cet acte symbolique reflète donc, aux yeux de l'opinion, la politique libérale du gouvernement de Raymond Barre. Dans le même temps, pour éviter une hausse soudaine des prix, il entendait favoriser la concurrence industrielle.

Le second choc pétrolier et la hausse du chômage

Il est difficile d'évaluer les effets de cette nouvelle politique économique car, l'année suivante, le second choc pétrolier replonge la France dans la crise économique. En 1979, les pays de l'OPEP décident d'une nouvelle hausse du prix du baril de pétrole. En quelques mois, le prix du baril double. Même si la politique de Raymond Barre permet de limiter les dégâts en matière économique, la politique sociale est un véritable échec. En 1979, on compte plus de 1 300 000 chômeurs alors qu'en 1974, on en comptait 690 000 chômeurs. Le nombre de chômeurs a donc doublé sous la présidence de Giscard d'Estaing.

L'appel de Cochin pendant la campagne électorale européenne de 1979

C'est dans ce contexte de climat économique morose que se déroulent les premières élections du parlement européen en 1979. Bien que ce soit des élections européennes, ce sont surtout les enjeux intérieurs qui dominent la campagne. Début décembre, alors que Jacques Chirac se trouve à l'hôpital après un banal accident de la route, il publie un texte connu sous le nom de « l'appel de Cochin » dans lequel il dénonce de manière virulente la position de l'UDF trop pro-européenne à ses yeux en qualifiant le parti de Giscard d'Estaing de « parti de l'étranger ». Devant la virulence des propos contenus dans ce texte rédigé par Pierre Juillet, conseiller de Jacques Chirac, beaucoup de gaullistes émettent des réserves. A commencer par le garde des sceaux de l'époque, Alain Peyrefitte, gaulliste historique, qui qualifie l'appel de cochin d'appel outrancier. De toute évidence, la publication de ce texte rend impossible une liste d'union RPR-UDF pour ses élections européennes. Ainsi, la droite se présente divisée entre une liste UDF conduite par Simone Veil et une liste RPR conduite par Jacques Chirac et Michel Debré. A gauche, le Parti communiste présente une liste conccurente à celle des socialistes, ces élections étant un prétexte pour ces deux partis de poursuivre leurs querelles depuis l'éclatement de l'Union de la gauche aux élections de 1978.

Résultats des élections européennes de 1979

Des quatre principales listes, celle de l'UDF est arrivée en tête avec 27,4% des voix, suivi des socialistes (23,7%) et des communistes (20,6%). La liste RPR n'arrive qu'en quatrième position avec 18,1%, ces résultats sanctionnant un appel de Cochin mal perçu par l'opinion. A deux ans de l'élection présidentielle, l'UDF de Giscard d'Estaing sort donc une nouvelle fois renforcée après le succès des Législatives en 1978. Pourtant, la fin du mandat de Giscard d'Estaing s'annonce plus difficile que prévu.

Le retour à une politique conservatrice

Pendant les deux dernières années du mandat de Giscard d'Estaing, on constate un changement de politique. Alors que le début du septennat avait été marqué par des mesures plutôt progressistes, on assite au retour d'une politique plus conservatrice. Beaucoup de réformes n'aboutissent pas comme la limitation du cumul des mandats. En revanche, Alain Peyrefitte, garde des sceaux, fait voter un projet de loi « Sécurité et liberté » répressif qui marque un retour à l'ordre.

Les affaires politiques : le suicide d'un ministre

Parallèlement à ce tournant conservateur, les dernières années de la présidence Giscard sont marquées par une série d'affaires qui touchent directement ou indirectement le pouvoir. Ainsi, le 30 octobre 1979, Robert Boulin, ministre dans le gouvernement de Raymond Barre, est retrouvé mort. Ce suicide est lié au scandale qui avait éclaté quelques semaines plutôt. Boulin était accusé d'avoir construit illégalement une villa à Ramatuelle sur un terrain vendu par un escroc. La presse s'est déchaînée contre le ministre, et Robert Boulin n'a pas vraiment été soutenu par le pouvoir en place. Ce suicide a provoqué une vague d'émotion dans l'opinion et a contribué à alourdir le climat politique.

L'affaire dite des « diamants de Bokassa »

L'affaire la plus embarrassante pour le pouvoir est celle dite des « diamants de Bokassa » impliquant directement Valéry Giscard d'Estaing. Le 10 octobre 1979, Le Canard Enchaîné publie un article dans lequel il accuse le président de la République d'avoir bénéficié d'un cadeau du dictateur de Centrafrique, Bokassa, d'une valeur d'un million de francs. Dès le lendemain, le journal Le Monde reprend les infos du Canard Enchaîné et attaque le président de la République dans un éditorial resté célèbre et intitulé « La vérité et l'honneur ». En réalité, il s'avère que Le Canard Enchaîné a bénéficié de fuites orchestrées par des proches de Bokassa. Ce dictateur, qui entretenait de bonnes relations avec Giscard d'Estaing, avait été laché par ce dernier et chassé du pouvoir par un coup d'Etat soutenu par la France. En exil, l'ancien dictateur avait donc réalisé un faux bon de commande de diamants d'un montant farfelux. Giscard d'Estaing avait bien reçu des diamants en cadeau, comme cela pouvait se faire entre chefs d'Etat lors de visite officielle, mais leur valeur avoisinait les 100 000 francs, soit 10 fois moins que la valeur annoncée par Le Canard Enchaîné. Toujours est-il que l'attitude de Giscard d'Estaing a contribué à alimenter le scandale : il a d'abord nié, puis traité cette affaire avec mépris sans vouloir se justifier ce qui a été perçu comme un signe de culpabilité. Même si il est difficile de dire si cette affaire lui a porté préjudice lors de l'élection présidentielle de 1981, deux ans après, Giscard d'Estaing était toujours obligé de se justifier dans les médias.