Les années De Gaulle
Après 12 années de traversée du désert, De Gaulle est rappelé au pouvoir suite à la crise algérienne que les hommes de la IVe République semblent incapables de résoudre, faute de réelle autorité. La constitution de 1958 permet à De Gaulle de centraliser l'essentiel du pouvoir entre ses mains. Elu président de la République en janvier 1959 par un collège de Grands électeurs, il s'entoure de quelques fidèles mais aussi de quatre ministres d'Etat qui sont d'anciens présidents du conseil sous la IVe République. Par ces nominations, il entend rappeler la continuité de l'Etat et de la République, malgré l'instauration d'un nouveau régime. Dès son accession au pouvoir, De Gaulle se consacre au règlement de la guerre d'Algérie.
Un mouvement de décolonisation a débuté partout dans le monde peu après la fin de la Seconde Guerre mondiale. L'Indochine obtient son indépendance en 1954, le Maroc et la Tunisie en 1956. Le cas de l'Algérie est différent : les liens sont extrêment forts entre ce territoire et la France. Ainsi, c'est la seule colonie à élire des députés qui siègent en métropole et à être directement administrée de France. Plus d'un million de « pieds noirs » d'origine française y sont installés depuis plusieurs générations. Ils occupent les plus hauts postes de l'administration et sont les principaux propriétaires terriens. En France, la majorité des hommes politiques est donc hostile à l'indépendance de l'Algérie. Le 04 juin 1958, De Gaulle apporte son soutien aux Français d'Algérie lors d'un discours dans lequel il prononce cette phrase restée célèbre : « Je vous ai compris ». En réalité, cette phrase est à double-sens : pour les uns, cela signifie qu'il n'est pas question d'accorder l'indépendance à l'Algérie, pour les autres, ils voient dans ces propos les signes d'une ouverture. En réalité, De Gaulle hésite à cette époque entre les deux options.
Progressivement, De Gaulle comprend que l'indépendance de l'Algérie est inéluctable malgré ses réticences. Il propose dans un premier temps un statut d'autonomie associée. Se sentant trahis, les partisans de l'Algérie française basculent et s'opposent violemment à De Gaulle. Ainsi, en avril 1961, des généraux de l'armée française défient l'autorité du chef de l'Etat en Algérie. Cet épisode est resté célèbre sous le nom de « putsch des généraux ». Face à la crise, De Gaulle prend les pleins pouvoirs comme le prévoit la nouvelle constitution en cas de menace contre la République et parvient à rétablir son autorité. Ces généraux, Salan, Jouhaud, Zeller et Challe, sont arrêtés et condamnés. La voie est alors libre pour les négociations : un accord est trouvé entre l'Etat français et le Front de libération nationale (FLN, partisan de l'indépendance). La signature des accords d'Evian intervient le 18 mars 1962 : l'Algérie obtient son indépendance, et les Français présents sur place sont théoriquement autorisés à rester.
Pendant les premières années de son septennat, De Gaulle s'appuie sur Michel Debré. Partisan de l'Algérie française, celui-ci laisse sa place en 1962 à Georges Pompidou qui devient premier ministre. Contrairement à Debré, Pompidou est plus technicien que politique. Peu connu du grand public, il n'a jamais exercé de responsabiblités politiques de premier ordre. Sa nomination est donc perçue comme une reprise en main du pouvoir par De Gaulle qui entend diriger lui-même l'action du gouvernement afin de mettre en oeuvre sa politique. En politique intérieure, Pompidou a pour objectif d'accompagner la croissance des Trente Glorieuses en modernisant les différents secteurs économiques. Chargé de la politique intérieure, il laisse ainsi le champ libre à De Gaulle pour s'occuper de la politique extérieure.
Face à la rivalité entre les Etats-Unis et l'URSS lors des premières années de la guerre froide, De Gaulle entend réaffirmer l'indépendance de la France. Cette autonomie passe par le développement d'une défense nationale efficace, et notamment le développement de la force nucléaire. Les premiers essais nucléaires ont lieu en février 1960. A Reggane au Sahara, la première bombe A de fabrication française explose. En juillet 1965, en Polynésie française, des essais sont repris pour mettre au point la bombe H (à hydrogène, beaucoup plus puissante). Parallèlement à cette politique de dissuasion nucléaire, il marque sa volonté d'indépendance à l'égard des Etats-Unis en sortant la France de l'OTAN (Organisation du Traité Atlantique Nord). Enfin, s'agissant de la politique européenne, il est favorable à une Europe des Nations et refuse que la France perde une partie de sa souveraineté comme le souhaiteraient les partisans d'une Europe fédérale calquée sur le modèle des Etats-Unis.