Deux partis politiques inconnus ont obtenu près de 500 000 euros de subventions publiques

Livres politiques · 2 sep. 2014 à 13:03 · Commentaires 0

Partis inconnus

Avez-vous déjà voté pour "Démocratie et République" ou l'IFMOM (les "Indépendants de la France de métropole et d'outre-mer") ? Il y a peu de chance. Et pourtant, ce sont des partis politiques au même titre que le PS, l'UMP ou encore Europe Ecologie. Dans son livre intitulé Le métier d'élu local, le député René Dosière raconte comment ces deux partis méconnus ont obtenu près de 500 000 euros de subventions publiques en utilisant les failles de la loi sur le financement de la vie politique. Des informations issues d'une enquête de Mediapart qui date de 2011 et qui était passée inaperçu à l'époque.

Pour bien comprendre, il faut revenir aux principes du financement des partis politiques : pour obtenir des subventions publiques, un parti doit présenter 50 candidats aux élections législatives et ceux-ci doivent obtenir au moins 1% des voix (le parti obtient ainsi une première enveloppe de subventions). Et pour chaque député élu, le parti perçoit une deuxième enveloppe de subventions. Voilà pour le principe. Mais il y a des exceptions. Exemple avec le parti "Démocratie et République", fondé par un sénateur de droite.

Démocratie et République : 249 000 euros de subventions en 2013

"Ce parti bénéficie du rattachement de six parlementaires, ce qui lui a rapporté 249 7774 euros d'aides publiques en 2013, écrit Dosière. Mais cela suppose qu'il puisse percevoir la première fraction de l'aide publique au vu de ses résultats électoraux. Or, n'ayant pas de militants, ce parti est tout à fait incapable de présenter 50 candidats susceptibles de dépasser 1% des voix... Cependant, en Outre-Mer, il suffit d'un seul candidat ! Et voilà comment ce parti, depuis plus d'une quinzaine d'années, utilise cette particularité ultra-marine à son avantage. Longtemps, son unique candidat outre-mer recueillait une voix (la sienne, vraisemblablement) et donc une aide publique de 1,60 euros. Situation ubuesque ! La législation a été durcie et le candidat unique doit obtenir au moins 1% des suffrages exprimés, mais cette condition a été facilement atteinte grâce à une ancienne députée polynésienne qui a obtenu 13 583 suffrages en 2012. En conséquence, Démocratie et République peut continuer à profiter du rattachement des parlementaires et reverse, à chacun de ces élus, le montant de leur apport, une fois retirés les frais de gestion de la structure". En clair, ces députés touchent eux-mêmes les subventions publiques.

Mais il y a pire : Démocratie et République étant reconnu comme un parti politique, les parlementaires de ce parti peuvent payer des cotisations. "Ainsi, en 2009, deux élus ont acquitté plus de 9 000 euros, défiscalisés à 66%, ce qui leur a permis de diminuer, voire de supprimer leur impôt sur le revenu", raconte René Dosière.

IFMOM : 208 000 euros de subventions en 2013

L'exemple de Démocratie et République a fait des émules. "Aux élections législatives de 2012, le micro-parti dit des "Indépendants de la France de métropole et d'outre-mer" (IFMOM) a présenté deux candidats outre-mer qui ont recueilli au total 500 voix. Cinq parlementaires se sont rattachés à ce parti, lui apportant 208 145 euros". Tout est légal, mais le législateur a prévu de mettre fin à cette situation anormale : "après plusieurs vaines tentatives, la loi sur la transparence financière prévoit la suppression du rattachement des parlementaires métropolitains à un parti d'outre-mer, explique Dosière. Cette disposition ne pourra prendre effet que dans la prochaine législature, la rétroactivité n'étant pas possible".

En clair, pour fermer le robinet à subventions pour ces partis politiques inconnus, il faudra attendre... 2017.


*** Source
- René Dosière, Le métier d'élu local, Seuil, janvier 2014

Le métier d'élu local - René Dosière



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