François Mitterrand : de l'échec de mai 1968 à la création du Parti Socialiste en 1971

Rétrospectives · 2 mar. 2008 à 23:07

Mitterrand en 1971

A l'issue de la présidentielle de 1965, François Mitterrand apparaît comme le leader incontesté de la gauche. Mais les événements de mai 1968 bouleversent sa stratégie. Mitterrand est dépassé par le mouvement de contestation et sa déclaration de candidature à une présidentielle anticipée est très mal perçue. Cette manoeuvre lui vaut d'être mis au ban de la gauche. La présidentielle de 1969 se déroule sans lui. Tout est à refaire pour François Mitterrand.


François Mitterrand a eu plusieurs vies : un passé trouble pendant la guerre, une carrière de ministres sous la IVe République, 23 ans d'opposition avant devenir le premier, et pour l'instant l'unique, président de gauche de la Ve République. A cette vie professionnelle si remplie s'ajoutait une double vie personnelle et une personnalité énigmatique. Homme de lettres, souvent distant, le 4ème président de la Ve République fascine encore aujourd'hui, 12 ans après sa mort.

Politique.net publie la biographie de François Mitterrand sous la forme d'un feuilleton en 15 épisodes, du 25 février au 10 mars 2008.

6ème épisode : Mitterrand, absent de la présidentielle de 1969

Mitterrand et le pouvoir

La précipitation de François Mitterrand en mai 1968

En février 1968, François Mitterrand souhaite se rapprocher des communistes. Il propose de faire une plate-forme commune afin de créer l'union de la gauche telle qu'il la souhaite depuis plusieurs mois. Ensemble, ils écrivent un texte commun, comprenant de nombreuses divergences.
En mai 1968, pendant les manifestations, les amis de la Convention sont tenus de défiler avec la jeunesse, mais sans conviction. Au contraire, François Mitterrand profite de la situation de crise du pays et de la vacance du pouvoir pour tenter de prendre le dessus. Le 28 mai, il s'adresse aux Français lors d'une conférence de presse pour se présenter à l'élection présidentielle contre un chef d'Etat qui ne gouverne plus le pays. Sa déclaration, loin de susciter l'enthousiasme général, choque au contraire. La gauche est aussitôt pénalisée. Aux élections de 1968, elle perd de nombreux sièges. François Mitterrand a réussi à conserver son siège de député de la Nièvre mais il est de nouveau rejeté, considéré comme un traître, si bien qu'il est contraint de siéger à l'Assemblée nationale comme non inscrit.

Les barricades de mai 1968

La présidentielle 1969 se fait sans Mitterrand

Son erreur d'appréciation de mai 1968 a divisé la gauche et l'a empêché de se présenter à l'élection présidentielle de 1969. A cette élection, la gauche a présenté plusieurs candidats dont Gaston Deferre, de la SFIO (Section Française de l'Internationale Ouvrière, c'est-à-dire les socialistes) qui a réalisé un score catastrophique de 5%. Seul le candidat communiste s'en sort avec les honneurs en obtenant 21% des voix. Mais face à cet échec, la gauche prend conscience de la nécessité de se rassembler si elle veut remporter des élections.
Les socialistes sont très divisés : il y a la SFIO de Guy Mollet et de Gaston Deferre, le PSU (Parti Socialiste Unifié) plutôt gauchiste, la Convention des Institutions Républicaines de Mitterrand, ainsi qu'une multitude de clubs. En juillet 1969, un premier regroupement s'opère entre différents clubs et la SFIO qui change de nom et devient parti socialiste avec à sa tête Alain Savary en remplacement de Guy Mollet. Mais le processus final de regroupement a lieu à Epinay en 1971.

Présidentielle de 1969

PS : l'ouverture du congrès d'Epinay en 1971

Quand François Mitterrand se rend au congrès du parti socialiste, il n'en est pas membre mais il a une forte popularité à gauche du fait de sa candidature à l'élection présidentielle de 1965. Depuis deux ans et les premiers rapprochements entre socialistes, le parti dirigé par Alain Savary est englué dans des définitions de doctrine opposant des courants modérés à des courants marxistes. Alors que Mitterrand est extérieur au parti et ne pèse que 15% des voix avec sa Convention des Institutions Républicaines, il réalise un tour de force. Dans un premier temps, il critique la direction actuelle du parti qu'il juge trop timide. Il se montre beaucoup plus offensif et parvient à dépasser les problèmes de doctrine en affichant le principal objectif que devrait avoir le parti socialiste : la conquête du pouvoir. Pour y parvenir, il veut créer un parti socialiste ouvert aux autres forces de gauche, c'est-à-dire les radicaux, les républicains et les chrétiens ce que la SFIO refusait jusqu'à présent. Malgré tout, il présente le parti socialiste comme un parti très à gauche, qui veut rompre avec la logique du capitalisme.

Epinay en 1971

L'élection de Mitterrand au poste de premier secrétaire du PS

Minoritaire au sein du parti, Mitterrand reçoit un très bon accueil et suscite l'espoir en affichant comme principal objectif la conquête du pouvoir. Pour gagner, il parvient à faire alliance avec deux groupes aux tendances plutôt opposées : le CERES (Centre d'Etudes, de Recherche et d'Education Socialiste), très à gauche et dirigé par Jean-Pierre Chevènement, et une partie de la SFIO emmenée par Gaston Deferre et Pierre Mauroy qui sont hostiles au dirigeant actuel du PS, Alain Savary. C'est dans ces conditions que le 16 juin 1971, François Mitterrand prend la direction du Parti Socialiste avec 43 926 voix contre 41 757 pour Alain Savary. Les socialistes sont désormais unis autour d'un dirigeant charismatique prêt à prendre le pouvoir. Reste, pour y parvenir, à conclure une alliance avec les communistes.

Congrès d'Epinay en 1971

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